Histoire/France 7 novembre Robert Solé

Né au Caire, longtemps journaliste au Monde, Robert Solé a consacré la plus grande partie de son œuvre (romans, essais, histoire) à son pays d'origine. Tant l'Egypte ottomane que l'Egypte antique. Avec La grande aventure de l'égyptologie il entreprend, dans un bel équilibre entre l'érudition et la clarté, de conter l'histoire de cette discipline de ses origines à nos jours en partant des rapports entre l'Occident et l'ancienne Khemet. Avec moult épisodes célèbres, et aussi des histoires oubliées, voire inédites.

Tout débute à la Renaissance, quand l'Italie, puis l'Europe, redécouvrent l'Antiquité via les Anciens, dont certains ont écrit sur l'Egypte : le Grec Hérodote, surnommé « le père de l'Histoire », qui vivait au Ve siècle av. J-C., son compatriote Strabon (au Ier siècle avant notre ère), ou encore le Romain Dion Cassius. Il y eut ensuite des explorateurs empiriques, précurseurs de l'égyptologie : comme le père Vansleb, dominicain envoyé par Colbert, en 1672-1673, afin d'acquérir des œuvres pour les collections royales ; le jésuite Claude Sicard, missionné en 1718 pour convertir les Coptes au catholicisme, en vain, et qui trouve, par hasard, Thèbes et Karnak. Et, bien sûr, la campagne de Bonaparte (1798-1801). Le jeune général emmène avec lui 167 scientifiques, dont Vivant Denon, qui publiera sa monumentale Description de l'Egypte de 1810 à 1826, et deviendra le premier directeur du Louvre.

Même si notre domination sur le pays n'aura duré que trois ans, Robert Solé montre comment, durant tout le XIXe siècle, l'égyptologie est devenue « science française ». Ce sont les Français qui ont trouvé la pierre de Rosette, confisquée ensuite par les Anglais, et ont offert à l'Egypte Champollion, le déchiffreur des hiéroglyphes. Après lui, Mariette, Maspero et le bien moins célèbre Pierre Lacau, directeurs des antiquités égyptiennes et du Musée du Caire, luttèrent farouchement pour que les objets trouvés en Egypte demeurent dans le pays. C'est grâce à Lacau, qui s'opposa résolument à Howard Carter, que le trésor de Toutankhamon, découvert en 1922, est demeuré intégralement propriété égyptienne, au lieu d'être partagé en deux avec son inventeur. Cette « exception française » suscita bien des rivalités, avec les Italiens, les Anglais, les Allemands, voire les Américains.

Mais le livre de Robert Solé ne se cantonne pas au passé. Il s'achève sur l'avenir : que reste-t-il à découvrir en Egypte ? Tout, répondraient les archéologues. Des villes, où l'on pourrait apprendre comment vivait le peuple ; il faudrait fouiller le fond du Nil, où reposent forcément des merveilles ; fouiller aussi sous l'Alexandrie moderne, retrouver la cité hellénistique, et, peut-être, la tombe d'Alexandre le Grand, le palais et le tombeau de Cléopâtre...

Alors que va s'ouvrir bientôt, au pied des Pyramides de Gizeh, le Grand Musée du Caire qu'on espère pharaonique, l'Egypte antique est plus présente que jamais, et son étude, récente en somme, a encore tant de grands chantiers devant elle.

Robert Solé
La grande aventure de l'égyptologie
Perrin
Tirage: 3 000 ex.
Prix: 24 euros ; 384 p.
ISBN: 9782262076566

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