"Tout le monde vient de quequ’part." Même Jesse, qui se trouve en plein interrogatoire de police. Ainsi débute le roman de Tony Birch. En Australie, cet enseignant à l’université de Melbourne s’intéresse à l’enfance, la marginalité et la violence, ses thèmes favoris. L’auteur ne s’étend guère sur sa vie, mais on sait qu’il a connu une adolescence difficile et reste attaché à ses origines aborigènes et irlandaises et aussi à cette expérience qui l’a forgé.
C’est comme s’il en avait "transfusé" des fragments à Jesse, un petit battant coincé par Gwen Flynn, cette femme dépravée qu’il n’appelle jamais "maman". Collectionnant les amants et les plans foireux, elle est incapable de s’assumer. Sa seule qualité est de lui avoir offert Rachel. "On est demi-frère et sœur. Et alors ? On a la bonne moitié en commun." Reliés par un cordon puissant, ils forment une paire. Jesse aimerait s’affranchir de cette vie, mais il se sent obligé de veiller sur sa sœur, unie face à l’adversité. D’autant que leur existence n’a rien en commun avec celle d’autres enfants. Non scolarisés, ils grandissent entre effluves d’alcool et fumée de cigarette. Rachel et Jesse ne peuvent compter que sur eux-mêmes et sur leur papy, qui défend sa fille brisée. Celle-ci ne peut s’empêcher de les embarquer dans un road-movie à travers l’Australie.
Tels des mini Bonnie & Clyde, les héros doivent de composer avec cette mère instable, qui s’est laissé embobiner par Ray, un homme violent, ayant le goût des coups et des petites filles. L’instinct de survie oblige la fratrie à s’aventurer vers des chemins dangereux. Le charme du roman aux multiples rebondissements, se situe dans la voix du narrateur, ce petit frère au cœur protecteur.
Kerenn Elkaïm