Le premier roman d’Imbolo Mbue a créé la surprise à la Foire de Francfort en 2014. Random House a déboursé un million de dollars pour acheter le texte de cette jeune inconnue : une Camerounaise de 33 ans incarnant une nouvelle plume africaine. Tout comme ses héros, elle a quitté la petite ville de Limbé pour rejoindre les Etats-Unis, ce pays qui continue à alimenter le mythe du rêve américain. Tout y semble possible, quoique. Son héros, Jende Jonga, aspire à un avenir meilleur. Cet homme responsable a gagné "sa part de lait et de miel, et de la liberté dont regorgeait cette Terre promise que l’on appelait Amérique". Il a sué pour parvenir à ses fins et faire venir les siens à New York. Neni, enceinte, et leur petit garçon découvrent leur nouvelle vie avec joie.
Tout paraît parfaitement en place lorsque Jende est engagé comme chauffeur de Mr. Edwards. Ce dernier représente la figure même de la réussite : une carrière de banquier chez Lehman Brothers. Tout sépare a priori ces deux êtres. L’un survit à Harlem, l’autre fait partie des hommes d’affaires enviés de Wall Street. Pourtant, ils se respectent mutuellement. Le rapprochement de leurs familles respectives laisse néanmoins entrevoir une autre réalité.
Mbue égratigne l’american dream en révélant les fractures intimes et sociales d’un mirage. Un effondrement raconté sur fond de crise des subprimes, en 2007. Si les nantis dégringolent, les immigrés comme Jende ne sont pas mieux lotis. Jusqu’où les héros sont-ils prêts à aller pour décrocher le sésame de la carte verte ou pour sauver leur peau ? K. E.