Roman/France 9 janvierAlexandre Feraga

En 1989, lorsque commence cette improbable saga, le narrateur a 10 ans. Il s'appelle Alexandre, et Dorothée, son premier grand amour, vient de lui dire : « Je t'aime ». De quoi lui faire un peu oublier son triste quotidien. Le garçon est en effet le souffre-douleur de sa famille, banlieusarde, mixte et largement recomposée. Son père, Mohamed, qui se fait appeler Maurice, est déjà celui de quatre enfants « arabes », dont le terrible Selim, son tortionnaire. Gérant de pressing, il boit, fume, tant pis pour le Coran, et se comporte en véritable tyran domestique. Notamment envers sa femme, Jocelyne, mère d'un fils d'un premier lit, comme on dit, totalement soumise à cet époux taiseux qui ne s'exprime que par énigmes et sentences vaguement moralisatrices. Ensemble, ils ont eu Alexandre, donc, le petit dernier, mais pas le chouchou pour autant.

Un matin bizarre d'été, Maurice/Mohamed charge jusqu'au toit la 504 familiale, comme pour partir en vacances au bled, via Marseille et le ferry. Le seul convié est Alexandre, qui s'en étonne bien un peu, mais se réjouit de se retrouver longuement en tête-à-tête avec ce père qu'il aime mais connaît si peu, dans l'espoir qu'ils se parlent enfin. Il ne sera pas déçu. A peine à bord, Mohamed oublie Maurice, et déclare à son fils : « notre nom n'est pas français », « toi aussi tu es un Arabe ». Et désormais il ne l'appellera plus qu'Habib, son second prénom, qui, fait-il remarquer non sans ironie, signifie « le bien-aimé ». Le garçon comprend qu'on l'emmène découvrir son pays de demi-origine, l'Algérie, et toute la famille, demeurée ou retournée vivre là-bas, comme les grands-parents, l'ombrageux Zahir et la despotique Zeïna. Chez eux, finis l'alcool et le tabac !

Au début, la perspective amuse plutôt Alexandre/Habib mais, à l'exception d'Idir, le jeune berger touareg originaire du Hoggar, dont il se fait un allié, un ami, il sent chez les autres une espèce de gêne à son égard, de gaieté fausse, comme si on lui cachait quelque chose d'important. Son père, lui, se montre encore plus fuyant que d'habitude. Quel mystérieux complot se trame dans les coulisses familiales ? Il le découvrira à ses dépens.

Et l'on n'en dira pas plus, préservant le suspense, le charme de ce roman initiatique largement autobiographique, drôle et touchant, réussi en dépit de quelques longueurs.

Alexandre Feraga
Après la mer
Flammarion
Tirage: 5 000 ex.
Prix: 19 euros ; 300 p.
ISBN: 9782081448285

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