Véronique Ovaldé fait sa première rentrée chez Flammarion. Un changement d’éditeur qui correspond aussi à un changement de cap. Quand notre époque valorise la sécurité, elle préfère se mettre en danger avec Soyez imprudents les enfants. Une consigne que suit à la lettre son héroïne, Atanasia Bartolome. "Avant mes treize ans il n’y avait rien. Seulement la longue attente de l’enfance." Un électrochoc vient la perturber : une toile représentant une femme dénudée, signée Roberto Diaz Uribe. Elle la découvre à Bilbao, lors d’une expo "Mon corps mis à nu". Elle c’est son âme qu’elle déshabille entre les lignes de ce livre.
On la suit à l’âge des mutations qui correspond à un "désir d’émancipation". Un peu comme l’auteure, qui se fond dans la peau de cette adolescente aussi franche qu’affranchie. Il y a quelque chose de violent chez cette fille unique adoptant un certain détachement. Qualifiée de mélancolique, Atanasia éprouve le besoin de couper le cordon avec les siens. Ce qui est sûr, c’est qu’elle ne veut pas leur ressembler. Elle perd son père à 17 ans et rencontre Rodrigo, qu’elle perçoit plutôt comme l’instrument d’un rite de passage que comme un premier amour.
Un an plus tard, elle quitte sa mère éplorée, direction Paris, synonyme d’autonomie et de féminisme. Atanasia y va surtout pour rencontrer Velevine, le spécialiste d’Uribe, cet artiste qui continue de la hanter. Qui est cet homme "narcissique, désinvolte et génial" ? Pourquoi s’est-il coupé du monde ? Une enquête énigmatique débute sur son lieu de naissance, Uburuk, une ville espagnole où Atanasia passait ses étés. Elle y retrouvait sa grand-mère, qui lui racontait l’histoire des Bartolome, ses aïeux glorieux ou amoureux. Des destinées romanesques qu’Ovaldé s’amuse à glisser tout au long de cette aventure.
Il s’agit d’une fresque à l’image de l’œuvre d’Uribe dont les peintures sont "très réalistes mais très étranges. Il y a toujours quelque chose qui déséquilibre l’ensemble". Avec ce roman, Véronique Ovaldé change de registre en s’ancrant dans un imaginaire européen, dépourvu de réalisme magique. Son écriture, contemporaine et tranchée, règle des comptes avec le passé. Atanasia s’inscrit dans la lignée des héroïnes qui cherchent un chemin vers elles-mêmes. Kerenn Elkaïm