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Qui sont les favoris pour le Nobel de littérature 2015 ?

Svetlana Alexievitch et Haruki Murakami sont parmi les favoris des bookmakers pour le Nobel de littérature. - Photo Peter Groth / Ivan Gimenez

Qui sont les favoris pour le Nobel de littérature 2015 ?

Plusieurs noms émergent des pronostics des critiques littéraires et des sites de paris en ligne  avant la proclamation du lauréat, jeudi 8 octobre à 13h (11h GMT).

Par Marine Durand,
avec AFP Créé le 07.10.2015 à 20h13 ,
Mis à jour le 08.10.2015 à 14h00

Qui succédera à Patrick Modiano ? A la veille de la proclamation du prix Nobel de littérature, prévue jeudi 8 octobre à 13h (11h GMT), le suspense rest entier et les paris vont bon train sur les sites dédiés.

Sur le site de paris anglais Ladbrokes, cinq noms recueillent les faveurs des parieurs : la journaliste et auteure biélorusse Svetlana Alexievitch, publiée en France chez Actes Sud, fait figure de favori, à 3 contre 1, suivie du japonais Haruki Murakami (Belfond), déjà pressenti depuis plusieurs années. Le Kenyan Ngugi wa Thiong'o (Présence africaine, La Fabrique), le Norvégien Jon Fosse (Arche éditeur) et l'Américaine Joyce Carol Oates (Philippe Rey) sont également cités.

"Le prix Nobel de littérature, c'est une compétition un peu mystérieuse. Chacun veut pouvoir tirer du prestige d'avoir deviné le bon nom", confie à l'AFP Jonas Nilsson, responsable de la communication d'Unibet Suède. "Ce qui est certain, c'est que l'Académie suédoise (qui choisit le lauréat) aime surprendre", affirme de son côté Gustav Källstrand, conservateur au musée Nobel.

"Il est impossible de dire qui sera le lauréat cette année. Il y a plus de cent auteurs envisageables, certainement davantage même", résume Madelaine Levy, critique littéraire du quotidien suédois Svenska Dagbladet. Ce que l'on sait en revanche, c'est que la méthode de l'Académie ne varie pas : en février, elle établit une liste de toutes les candidatures qui lui ont été soumises, avant de la réduire en mai à cinq noms, sur lesquels ses membres planchent pendant l'été avant de déterminer l'élu, dont la consécration intervient début octobre.

Une question de géographie ?

Pour se repérer dans ce flou, il est possible d'analyser les tendances des dernières années, et par exemple de remarquer que l'Europe a été surreprésentée. "Dernièrement l'Académie a eu tendance à s'intéresser aux auteurs qui auscultent l'identité européenne après la Shoah (…) et aussi ceux qui explorent les traces du colonialisme", estime Björn Wiman, responsable des pages culturelles du quotidien suédois Dagens Nyheter.

Dans ce contexte, Madelaine Levy "imagine que le prix ne récompensera pas un Suédois, si peu de temps après Tomas Tranströmer (primé en 2011), ni encore un Français après Modiano". Mais selon Jens Liljestrand, critique littéraire au journal suédois Expressen, le critère géographique n'entre même pas dans les considérations de l'Académie. "Ce n'est pas comme lorsqu'on prévoit la prochaine ville hôte des jeux Olympiques et qu'on se dit : cette fois, c'est le tour de l'Afrique", dit-il.

Dans les dîners en ville à Stockholm, on s'accorde à dire qu'il serait de bon ton de récompenser la littérature africaine. Ngugi wa Thiongo donc, mais aussi le Somalien Nuruddin Farah et le Nigérian Ben Okri seraient bien placés. À moins que les Etats-Unis mettent fin à des années de disette, "complètement incompréhensibles" d'après Jens Liljestrand. Leur dernier Nobel de littérature remonte à 1993. "L'Académie a manifesté une aversion vis-à-vis de la littérature américaine (...) Je ne protesterai pas si [Philip] Roth (Gallimard) ou Oates étaient récompensés", souligne Björn Wiman. Sur Nicer Odds, un autre site recensant les paris, les deux Américains apparaissent d'ailleurs en bonne position.

Plusieurs médias américains se prêtent également au jeu des pronostics. Ainsi, alors que le Wall Street Journal ajoute le poète syrien Adonis (Seuil, Mercure de France) à la liste des noms suscités, le Los Angeles Times propose à ses lecteurs de voter pour leur favori dans une liste de 11 prétendants. Murakami sort premier, avec 30 % des voix.

Les femmes à la traîne

Outre les considérations géographiques, on peut aussi noter que la très féministe Académie de Suède n'a donné ce prix qu'à 13 femmes, sur 111 lauréats depuis 1901. "Pendant longtemps, ça a aidé d'être un homme, âgé de préférence. L'Académie ne réfléchissait pas à cette problématique : l'inégalité entre les sexes était une évidence", souligne Madelaine Levy. "Lors des dix dernières années, les statistiques, qui ne sont toujours pas réjouissantes, montrent une sensible amélioration (…) ce qui démontre qu'on est désormais conscient" du problème, et que le jury "s'efforce de faire des choix plus justes", ajoute-t-elle.

"Dernièrement, il y a eu pratiquement une femme tous les trois ans. Ils sont plus attentifs", abonde Jens Liljestrand. La préférée des parieurs, Svetlana Alexievitch, apparaît ainsi comme une prétendante crédible, d'autant que "son œuvre est à la frontière entre reportage et roman: un genre qui n'a pas été récompensé", relève Björn Wiman. Autre femme dont le nom est apparu récemment, l'Américaine Ursula Le Guin. Mais cela impliquerait que l'Académie se convertisse à la science-fiction, genre qui suscite encore la méfiance dans l'aristocratie littéraire. "Exaltant, mais pas vraiment crédible", selon Jens Liljestrand.

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