Hormis la publiquement controversée partie sur le téléchargement, la loi « favorisant la diffusion et la protection de la création sur Internet », dite «  HADOPI » , comporte des dispositions surprenantes sur les droits d'auteur des journalistes de la presse écrite ; que les premiers intéressés ont omis d’analyser et de commenter, obnubilés par d’autres formes de lobbying. La réforme repose sur deux principes : d’une part, celui de la cession automatique des droits d’auteurs du journaliste à son employeur pour l’exploitation de ses articles sur tous supports dans le cadre du « titre de presse » ; et, d’autre part, celui de l’absence de rémunération complémentaire en contrepartie de ces exploitations et/ou réexploitations pendant une période déterminée par accord collectif. En effet, l’employeur n'est plus tenu de demander l'accord du journaliste pour utiliser ses articles sur les différents supports de la publication pour laquelle celui-ci travaille. Mais, passée une période liée à la périodicité du média, il doit percevoir une rémunération complémentaire. La mise en œuvre de ces dispositions doit être précisée par un accord collectif. Les dispositions de la loi HADOPI relatives aux droits d’auteurs des journalistes professionnels viennent donc mettre un terme à la loi et jurisprudence antérieures, selon lesquelles toute reproduction, quel qu’en soit le support, d’un article déjà publié impliquait l’accord individuel du journaliste (figurant en principe dans le contrat de travail ou un avenant). Désormais, la cession des droits d’auteurs des journalistes devient automatique, et ce non seulement pour la première publication mais pour toute publication dans le cadre du « titre de presse ». L'exploitation de l'œuvre du journaliste dans le cadre du « titre de presse » sur différents supports aura pour seule contrepartie le salaire pendant une période référence fixée (en considération notamment de la périodicité du titre et de sa nature) par accord d’entreprise ou accord collectif. Les nouveaux articles législatifs, inclus à présent au Code de la Propriété Intellectuelle, prévoient la possibilité d’élargir, toujours par accord d’entreprise, le principe de la cession automatique des droits d’exploitation des journalistes sur leur œuvre, à la «  famille cohérente de presse  », cette fois contre une rémunération complémentaire au salaire. Pour les juristes, tout cela signifie autant de notions inédites en droit, de la «  période de référence  » à la «  famille cohérente de presse  », qui vont appeler les juridictions à se prononcer sur la portée et la remise en cause des accords qui seront, le cas échéant, conclus entre groupes de presse et syndicats représentatifs. Notons que les photographes tirant leurs revenus d’autres exploitations que la collaboration à un titre de presse sont exclus de ce dispositif. Par ailleurs, l’HADOPI maintient le droit de recueil du journaliste, lequel est défini au sein du Code de la Propriété Intellectuelle : «  L’auteur seul a le droit de réunir ses articles et ses discours en recueil et de les publier ou d’en autoriser la publication sous cette forme.  » Cependant, deux limites à ce droit sont posées par la réforme HADOPI.    En premier lieu, le droit de recueil ne doit pas contrevenir au droit de l’employeur d’exploiter seul les articles pendant la «  période de référence  ». De plus, l’exploitation par un journaliste de ses écrits ne doit pas concurrencer l’exploitation des titres de presse dans lesquels l’employeur a le droit d’exploiter les œuvres des journalistes. Ainsi, le droit de recueil du journaliste est maintenu par la réforme, laquelle l’a cependant restreint, du fait de l’élargissement des droits d’exploitation des entreprises de presse. Tout éditeur devra désormais s’efforcer de vérifier que son auteur, par ailleurs journaliste, peut librement réutiliser ses articles pour les fondre en volume de librairie, en exigeant de vérifier l’accord d’entreprise et non plus le seul contrat de travail. La fameuse HADOPI n’a pas fini de nous surprendre, voire de heurter.  
15.10 2013

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