Sous les ficus du Jardin botanique de Palerme, les auteurs français –Barbara Abel, Laurent Binet, Gilles del Pappas, Marc Fernandez, Emmanuel Grand, Dominique Manotti, Dominique Sylvain, Olivier Truc– ont débattu avec leurs confrères siciliens, Piergiorgio Di Cara, Santo Piazzese, Antonio Pagliaro, Gian Maura Costa des grands thèmes du polar: "De l’histoire à l’Histoire: les tendances du noir entre la chronique de faits divers et les événements historiques", "Le roman policier français entre suspense et atmosphère noire", "La ville dans le roman noir". Tandis qu’Ena Marchi, éditrice d’Adelphi, racontait l’histoire de la traduction de Simenon en italien.
Plutôt axée sur les petits éditeurs indépendants, la manifestation "Una marina di libri", si elle est généraliste, n’en est pas moins située en terre de polars. Avec les figures tutélaires de l’auteur de best-sellers Andrea Camilleri, et l'éditeur phare du genre en Italie, le Palermitain Sellerio, le roman noir a les faveurs des auteurs et du public, solidement ancré dans une réalité urbaine, sociale et quotidienne, sur fond de mafia. Pour l'écrivain Santo Piazzese, Palerme symbolise la réalité urbaine décrite par les romans: "la ville est nécessaire au roman noir, facultative au jaune" précise-t-il. "On ne peut pas écrire un roman noir sans parler de la mafia, surtout à Palerme" confirme l’auteur Antonio Pagliaro. Pour preuve, la petite maison Il palindromo a même une collection entière "de littérature militante anti-mafia. C’est un engagement qu’il faut avoir dans son catalogue" ajoute l’un des fondateurs Francesco Armato.
Assassinat d'un jardinier
Multiculturelle et attentive à la traduction, Palerme ne compte pas moins de trois associations –Aniti (Associazione nazionale italiane Traduttori e interpreti), Stradlab et AITI (Assoxiazione italiana traduttori e interpreti)– qui ont organisé un "slam" (une joute) de traduction samedi 9 juin sur un texte d’Emmanuel Grand, où deux traducteurs ont chacun proposé leur version du texte. L’exercice, toujours passionnant, a surpris l’auteur, mis face à deux versions de son texte dans des styles très différents. " J’ai l’impression de deux livres complètement différents", s'est-il étonné, faisant part de son impression de ne plus être l'auteur, mais "le co-auteur" de ses romans à l’étranger. "Je suis inquiet pour mes lecteurs italiens", a-t-il ironisé.
Renforcer les liens
Très contente du partenariat entre Institut français, Quais du polar et "Una marina di libri", Bernadette Vincent, attachée pour le livre à l’Institut français en Italie, commente: "Quais du polar a su s’adapter à la réalité locale et s’est montré très souple dans ses propositions. "Una marina di libri" est une manifestation à taille humaine et conviviale, et l’opération "Noir alla francese" a permis de créer des liens avec les auteurs, qui, j’espère, resteront solides", ajoutant: "Cela n’a pas de sens de la renouveler chaque année mais nous réfléchissons à d’autres festivals dans d’autres villes". "Le jardin botanique est "the place to be" à ce moment de l’année", conclut Eric Biagi.