11 janvier > Essai France > Jean-Claude Michéa

George Orwell espérait voir un jour une société "libre, égalitaire et décente". L’écrivain britannique reste pour Jean-Claude Michéa une référence et continue d’inspirer sa propre réflexion. On retrouvera donc dans ce livre cette même veine humaniste avec la conviction que le capitalisme est en train de vivre ses derniers jours.

Comme à son habitude, le philosophe ne s’encombre pas de circonlocutions. Il dit ce qu’il a à dire et principalement à cette gauche libérale qui désigne la finance comme son ennemi au Bourget et ne rêve que de Wall Street à New York.

Pour Michéa, ce capitalisme-là est condamné. Le système économique et financier mondial ne peut continuer de fonctionner en crise permanente, avec le chômage et la précarité comme indicateurs constants, comme s’il n’y avait pas de pollutions, de catastrophes, de réchauffement climatique, en ignorant les inégalités sociales, éducatives et urbaines.

"Il ne fait aujourd’hui aucun doute que les catégories populaires - précisément parce qu’elles en sont toujours les premières victimes - ressentent déjà de manière infiniment plus profonde que tous les sociologues de gauche réunis les effets humainement désastreux de cette intégration dialectique toujours plus poussée entre l’économique, le politique et le culturel."

Notre ennemi, le capital est un livre gigogne. Le point de départ en est un entretien accordé au site socialiste et décroissant Le Comptoir. Les réponses aux quatre questions posées sont accompagnées de notes en bas de page et de renvois à des "scolies", des commentaires eux-mêmes suivis de notes infrapaginales.

La pensée de Michéa se fait ainsi buissonnière et buissonnante. Elle sort des sentiers battus du libéralisme. On y salue Marx, Debord, Flaubert et Orwell bien sûr. Elle dérange les bonnes consciences de gauche et malmène celles de droite qui finissent par se confondre dans ce grand abrutissement planétaire des idées toutes faites.

L’auteur avec Jacques Julliard de La gauche et le peuple (Flammarion, 2014, réédité le 22 février en "Champs essais") reprend à son compte la formule de Gramsci : "Seule la vérité est révolutionnaire." Elle finira bien, pour lui, par triompher du mensonge capitaliste, de son égoïsme et de son individualisme. Si vous pensez que la gauche est en décomposition, lisez ce livre. C’est bien pire. L. L.

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