Ce texte fait suite au réquisitoire rendu le 25 janvier par le procureur général de la Cour Suprême turque qui demande l’annulation de la quatrième décision d’acquittement prononcée en 2014 en faveur de l’écrivaine, féministe et militante des droits de l’homme. Le procureur réclame par la même occasion, une nouvelle fois, la condamnation à perpétuité pour " participation à un attentat terroriste " datant de 1998. "Nous sommes inquiets de la tournure dangereuse que prend ce procès en particulier, en particulier compte tenu du climat politique tendu en Turquie", continue son éditrice.
Procès kafkaïen
Après avoir passé deux ans et demi en prison durant lesquels de nombreux intellectuels et avocats se sont mobilisés pour sa libération, Pinar Selek a été relaxée en 2000 et acquittée en 2006 avant de se retrouver prise dans un procès kafkaïen qui l’a amené à fuir la Turquie en 2009. "C’est difficile de comprendre pourquoi cette décision arrive maintenant tant le régime est autoritaire et arbitraire : à chacun de mes quatre acquittements, succèdent de nouveaux appels" se désole Pinar Selek jointe par Livres Hebdo. Usée, l’écrivaine de 45 ans qui s’est installée en France en 2011 et enseigne à l’université Sophia Antipolis de Nice tente de "garder force et courage". "Il est dur de raconter encore et toujours mon histoire mais c’est important de rendre visible, de dire, ce qui m’arrive à moi et à d’autres personnes".
Echo au procès d’Asli Erdogan
Même si l’interminable procès de Pinar Selek a débuté bien avant la purge du président turc Recep Tayyip Erdogan, l’affaire n’est pas sans rappeler celle d’Asli Erdogan - toutes deux sont poursuivies non pas en raison de leurs productions d’écrivaine mais pour des prises de position contre le gouvernement. "Je suis toujours surprise de voir qu’ils n’ont jamais interdit mes ouvrages en Turquie, même celui sur un sujet délicat comme le service militaire et que les titres pour enfants que j’ai écrit son lus dans les écoles !", s’étonne Pinar Selek qui édite en Turquie chez Iletisim.
Soutenue par de nombreux comités en France comme en Allemagne et en Italie, l’écrivaine attend "un jour ou l’autre", la décision des juges. "Pinar Selek est le symbole d’une Turquie résistante qui doit continuer à penser, à créer malgré la répression ", conclut Liana Lévi.
L’écrivaine qui a déjà publié plusieurs titres chez l’éditeur comme La maison du Bosphore (2013) et Parce qu’ils sont arméniens ( 2015) ne se laisse pas abattre : elle travaille actuellement à un nouveau roman.