Best-seller de la littérature anglaise pour la jeunesse, paru en 1958, Tom et le jardin de minuit de Philippa Pearce (Gallimard Jeunesse) est un roman fantastique, dans lequel un petit garçon, en vacances forcées chez son oncle et sa tante parce que son frère a la rougeole, se trouve projeté chaque nuit dans le passé, dans un grand jardin qui prend la place de la courette de la maison chaque fois que, au milieu de la nuit, l’horloge du hall sonne… treize coups. Edith, qui a découvert le livre à l’âge adulte, a décidé de l’adapter en bande dessinée en en conservant la trame et la dimension fantastique. Mais elle le tire vers un public adulte en le recentrant sur les problématiques du souvenir et de la nostalgie, du paradis perdu de l’enfance. La rencontre décisive, dans le jardin perpétuellement ensoleillé, entre Tom et Hatty, une fillette de son âge mais visiblement inscrite, par ses vêtements notamment, dans la fin du XIXe siècle, tourne en une réflexion sur le temps qui passe, sur les rapports entre vécu quotidien et réminiscences intimes du passé, sur la synchronisation et la désynchronisation des rythmes de chacun. Car si Tom se rend dans le jardin chaque nuit, aux treize coups de minuit, Hatty, elle, prend des mois, voire des années entre ses visites. La dessinatrice rend avec une infinie délicatesse le mouvement lent et inéluctable des saisons, les enjeux de la sortie progressive de l’enfance et les blessures qu’elle inflige. Fabrice Piault