3 septembre > Essai France

En politique, le mot "aveuglement" s’emploie surtout au sens figuré. Ce n’est plus de la vue, mais du discernement dont on est privé. Marc Ferro a recherché les origines de cette absence d’esprit critique dans l’histoire qui se manifeste principalement au XXe siècle. Historiquement, l’aveuglement commence sous les Lumières, ce qui est somme toute assez logique. C’est à cette époque qu’entre en jeu la raison et non plus la volonté divine. Maître de son destin, l’homme devient donc libre de se tromper dans ses analyses. Il ne va pas s’en priver.

Aveugles, les Allemands le furent quand ils crurent avoir gagné la guerre le 11 novembre 1918, les Français quand ils pensèrent avoir sauvé la paix après Munich en 1938, tout comme les Américains quand ils ne prirent pas la mesure du terrorisme en 2001.

Pourtant, les experts et les agences d’information ne manquent pas. On sait, mais on ne comprend pas. En multipliant les exemples, Marc Ferro constate que c’est moins le bon sens que l’aveuglement qui serait la chose la mieux partagée au monde. En fait, on préférerait tenter de limiter les effets des crises plutôt que de les empêcher.

Mais pourquoi ce sentiment de découvrir les choses trop tard, alors que toutes les informations étaient disponibles ? L’auteur des Tabous de l’histoire (Robert Laffont, coll. "Documento", 2013) examine les mécanismes de ces aveuglements multiples par refus de prendre en compte la réalité, par inconscience, par idéologie, par dégoût, par cynisme ou par naïveté utopique.

Sans être moralisateur, voici un essai important d’un historien majeur qui fait réfléchir sur les leçons que l’on devrait tirer du passé. Laurent Lemire

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