Avant-critique Roman

Montserrat Roig, "L'heure violette" (La Croisée)

Montserrat Roig - Photo © Pilar Aymerich

Montserrat Roig, "L'heure violette" (La Croisée)

Avec L'heure violette, poursuite de la publication de l'œuvre romanesque, élégante et féministe de l'étoile filante de la littérature catalane, Montserrat Roig.

Parution 7 mai

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Par Olivier Mony
Créé le 07.05.2025 à 14h00

Femmes de Barcelone. Ils sont tous d'accord. Mario Vargas Llosa, Manuel Vázquez Montalbán, Colm Tóibín. Montserrat Roig, rapide, gracieuse, juste, est une écrivaine majuscule. Était plutôt, hélas, puisqu'elle est décédée en 1991, à 45 ans, des suites d'un cancer du sein. Et il a fallu attendre l'année dernière pour que les excellentes éditions La Croisée rendent enfin accessibles ses romans en français, comme ils le sont désormais dans nombre de pays européens et comme ils le seront cette année aux États-Unis. Après Le temps des cerises, voici donc le tout aussi magistral L'heure violette qui s'inscrit au sein d'un cycle romanesque consacré à Barcelone, la ville natale de l'autrice. On y retrouvera certes les héroïnes découvertes dans le premier volume, mais nul besoin de l'avoir lu pour goûter pleinement toute l'élégance, l'insolence parfaite de celui-ci.

Cette histoire catalane est d'abord une histoire de femmes. Des femmes qui, dans une Espagne en train de se libérer lentement de la dictature, font l'apprentissage, parfois malaisé, de leur liberté, sexuelle et amoureuse. Natalia rumine sa liaison adultère, longue et désespérée à la fois, avec Jordi, et la nature du couple que celui-ci forme avec sa femme Agnès... Kati, elle, vit une passion sans issue avec un ancien des Brigades internationales. Les générations qui les ont précédées ne sont pas non plus exemptes des tumultes des liaisons. Ainsi, c'est toute la vie de secrets de Judit, la mère défunte de Natalia, qui va être dévoilée. Tout ceci sous le signe du charme joliment excentrique d'une bourgeoisie cultivant à loisir son catalanisme et son indépendance. Ceci dit, ne nous y trompons pas, la véritable héroïne du roman, − comme souvent, comme toujours peut-être − de Montserrat Roig, c'est Barcelone. La romancière est aux femmes de sa ville qui en épousent le baroque flamboyant et rebelle ce qu'un Juan Marsé fut à ses hommes, à son petit peuple. La politique chez elle est aussi une politique du désir. Un ressassement magnifique. On a volontiers installé Montserrat Roig aux côtés des reines du féminisme de sa génération, Annie Ernaux ou Goliarda Sapienza. C'est bien là en effet qu'elle se tient, trop longtemps oubliée, désormais inoubliable.

Montserrat Roig
L'heure violette
La Croisée
Traduit du catalan (Espagne) par Marc Audi
Tirage: 3 000 ex.
Prix: 22 € ; 288 p.
ISBN: 9782413089407

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