Médias, librairies et Internet : rivalité et complémentarité

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Médias, librairies et Internet : rivalité et complémentarité

Qui est le plus prescripteur aujourd'hui ? Le libraire, le journaliste ou l'internaute anonyme ?, s'interrogeait le Motif dans une conférence, samedi 17 mars au Salon du livre.

Par Vincy Thomas
avec vt Créé le 15.04.2015 à 22h43

Le Motif organisait une conférence “Je like, tu likes, nous likons”, samedi 17 mars au Salon du livre de Paris, pour s'interroger sur la critique, la prescription et la recommandation : qui a le plus d'influence aujourd'hui : Les médias ? les réseaux sociaux ? Les libraires ?

Selon une récente étude de GFK, les réseaux sociaux ne sont toujours pas reconnus comme un vecteur de choix pour un livre, même le bouche à oreille, qui y participe puisqu'il peut aussi se développer par Internet, se classe, lui, deuxième dans la hiérarchie des vecteurs de prescription. Selon cette même étude, 43 % des livres achetés le sont de manière impulsive dans une librairie. Les librairies auraient donc encore cet avantage sur Internet.

Amazon, cependant, ne serait qu'un amplificateur et non un prescripteur. Pour l'instant, selon Philippe Touron, directeur de la librairie Le Divan, à Paris, une librairie en ligne n'a jamais été à l'origine d'un succès, elle ne fait qu'en profiter.

Pierre Frémeaux (Babelio) rappelle tout de même qu'Amazon est le premier site en nombre de “critiques littéraires” dans le monde. “Même si le cybermarchand ne communique pas ses chiffres, une notice avec des recommandations conduit plus facilement l'internaute à acheter. Cela n'enlève rien au poids des médias ou des libraires pour dynamiser les ventes d'un livre. Mais Amazon c'est un bouche-à-oreille accessible à tous, tout le temps.”

Internet permet de créer des communautés de lecteurs sur des sujets pointus, des auteurs oubliés ou des phénomènes de littérature. “C'est vrai ”, explique Philippe Touron qu'il y a “des secteurs plus communautaires comme la littérature adolescente, où la visibilité en ligne a plus d'effet pour promouvoir un événement”. David Caviglioli (Bibliobs) confirme que sur des segments comme la “Chick Lit”, les blogs ont bien plus d'impacts que les canaux traditionnels.

Sébastien Rouault (GFK) souligne que le réseau favorise aussi “la longue traîne” avec une hausse de 30 % des références vendues par an. Pour ce qui est du fonds, Internet domine les réseaux physiques tant pour le conseil que pour l'achat. Sur Babelio, les lecteurs en ligne peuvent être des experts et avoir autant de poids qu'un libraire ou un critique.

tout le monde veut parler de livres, finalement"

Philippe Touron considère de son côté, que sans librairie aucune prescription n'a d'impact. S'il fait davantage confiance à la presse écrite, il avoue qu'il consulte désormais quelques blogs. David Caviglioli relativise malgré tout le poids d'Internet dans la critique. “La presse écrite ne parle pas que des phénomènes de littérature ou des auteurs connus. Nous sommes aussi là pour défendre des auteurs qui n'intéressent pas les internautes.” Il ajoute que “la critique en ligne ne fonctionne pas”. Il prend pour exemple la récente fermeture de la rubrique livre du site culturel Fluctuat (groupe Lagardère). “Il y a des livres qui ne sont pas intéressants pour Internet.”

Estelle Divet (responsable marketing au Seuil) prend comme exemple Mohammed VI, le roi prédateur, qui est typiquement le genre de livre prescrit grâce à Internet avec les réseaux sociaux au Maroc. Pour elle, sur des genres particuliers comme le polar, il vaut mieux aller chercher des blogueurs passionnés que des journalistes en vue d'un lancement.

Pierre Frémeaux défend l'idée qu'Internet est capable d'être prescripteur dans tous les genres. “Peu importe l'audience sur certains livres, tant qu'ils intéressent des lecteurs, même un micro-segment.” La typologie des réseaux sociaux, selon lui, reflète la typologie des lecteurs et des lectures. “Ils parlent de livres qui sont dans les Meilleures Ventes de Livres Hebdo, à l'exception du régime Dukan.”

Le principal défi est de faire découvrir d'autres livres, en dehors de leurs centres d'intérêts, au lecteur. Les réseaux sociaux devraient jouer ce rôle là, même si, de l'avis de tous, on ne peut pas encore quantifier leur impact. Pour l'instant, on est loin de transformer un “like” sur Facebook en achat de livre. Mais des outils automatiques apparaissent et servent aussi à conseiller des livres (“Si vous avez aimé ça, vous pouvez lire ça”).

Philippe Touron conclut sur une évidence : qu'il s'agisse du web, des libraires ou des médias plus traditionnels, “tout le monde veut parler de livres, finalement”.

15.04 2015

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