Testament

La Cour d’appel de Paris, le 11 octobre dernier, a jugé, une fois de plus, que l’exécuteur testamentaire d’un auteur ne pouvait transmettre à son tour le droit moral pour lequel il a été mandante par l’auteur.

De fait, l'exécuteur testamentaire est une figure mythique de Saint-Germain-des-Prés, mais dont le rôle exact et les véritables pouvoirs demeurent obscurs à beaucoup.

C'est le Code civil, en sa partie relative aux successions, qui définit l'exécuteur testamentaire comme la « personne désignée par le testateur pour assurer l’exécution de ses dernières volontés et à laquelle il peut donner la saisine de son mobilier pendant un jour et un an ». Au sens classique du terme, l'exécuteur testamentaire peut être, par exemple, chargé de la répartition des biens du défunt qui a placé en lui sa confiance. 
Le droit de la propriété littéraire et artistique s'est approprié la notion d'exécuteur testamentaire. Son indépendance supposée, notamment vis-à-vis tant de la famille de l'auteur que de la morale publique, sa connaissance des écrits, publiés ou inédits, et des désirs profonds du créateur tels qu'il les lui a souvent exprimés de son vivant au gré de leur amitié, en font en effet l'homme idéal pour gérer au mieux le destin d'une œuvre après la disparition de l'écrivain.

C'est ainsi que l’article L 121-2 du Code de la propriété intellectuelle dispose en son deuxième alinéa : « Après sa mort, le droit de divulgation de ses œuvres posthumes est exercé leur vie durant par le ou les exécuteurs testamentaire désignés par l’auteur ». Ce n'est qu' « à défaut » de désignation d'un exécuteur testamentaire, et « sauf volonté contraire de l'auteur », que les héritiers classiques exerceront ce droit selon l'ordre établi par la loi : descendants, conjoint, autres héritiers.

L'intervention d'exécuteurs testamentaires n'est autorisée pour l'exercice d'autres attributs moraux que le droit de divulgation : le droit au respect du nom ainsi le droit au respect de l'œuvre peuvent aussi être exercés par un exécuteur testamentaire si l'auteur en a expressément manifesté le désir dans le libellé de ses dernières volontés.

La mission de l'exécuteur testamentaire peut donc s'étendre de la décision de publication des inédits jusqu'au choix et au contrôle des rééditions. Il ne peut en revanche intervenir à la place des héritiers légaux pour veiller sur la mémoire de l'écrivain. La poursuite des atteintes à l'honneur ou à la vie privée ne rentre pas dans ses pouvoirs.

Le testament de l'auteur peut prévoir toutes sortes de modalités et combinaisons. L’auteur peut avoir limité la mission à certains droits ou encore à certaines œuvres seulement. Plusieurs exécuteurs testamentaires sont parfois chargés chacun d’une mission spécifique ou de la gestion d'une partie de l'œuvre : à l'un la fiction, à l'autre la correspondance, etc. Il est également possible à l'auteur de prévoir pour la même mission une sorte de co-gérance par deux ou trois exécuteurs testamentaires, réunis en comité. Il est de même possible que l'exécuteur soit lui même soumis au contrôle d'un tiers, dont l'avis peut le lier ou être simplement consultatif. L'exécuteur testamentaire peut même être une personne morale, telle qu'une fondation voulue par l'auteur, une association, etc.

Les héritiers peuvent cependant contrer, voire faire mettre fin à la mission l'exécuteur testamentaire lorsqu'il ne la remplit pas correctement, par exemple en commettant des malversations ou en ne respectant pas les volontés expresses de l'auteur. Le choix par l'exécuteur testamentaire d'un éditeur confidentiel peut aussi être dénoncé. A l'inverse, c'est parfois la publication chez un éditeur trop « populaire » qui est susceptible d'être remise en cause...

Hormis les cas où la durée la mission est envisagée clairement dans le testament, celle-ci prend fin au décès de l'exécuteur testamentaire. L'exercice des droits revient alors aux héritiers de l'auteur et on à ceux de l'exécuteur.

Toutefois, l'auteur peut avoir valablement envisagé le décès du gardien de son œuvre et avoir organisé une sorte de passation de pouvoirs de façon à éviter que sa famille, un jour, ne puisse s'en mêler. Celle-ci n'a d'ailleurs pas la faculté de révoquer l'exécuteur testamentaire qui est considéré en droit comme le mandataire du défunt et non de ses héritiers.

Les dernières
actualités