1er septembre > Essai France

Cela fait déjà quelques décennies que la science est saisie par la vitesse et la rentabilité. Par science, il faut bien sûr entendre les scientifiques et les laboratoires à qui l’on demande d’être performants. Les chercheurs passent plus de temps à publier et à se faire connaître qu’à chercher vraiment. C’est le constat amer de Nicolas Chevassus-au-Louis dans cet essai décapant qui révèle cette malscience comme il y a une malbouffe.

L’auteur d’Un iceberg dans mon whisky (Seuil, 2009, "Points sciences", 2016) bénéficie de sa double casquette de journaliste et de docteur en biologie. Il a donc fréquenté lui-même ces labos qui traquent plus le budget que la découverte. Cela les conduit quelquefois à falsifier des résultats ou à ne pas les vérifier suffisamment. On imagine les conséquences dans l’élaboration de nouveaux médicaments…

Dans son enquête, il rapporte différentes affaires frauduleuses qui firent du bruit dans le landerneau scientifique. On y retrouve des biologistes coréens, un physicien allemand et les frères Bogdanoff. Ceux qui trichent, fabriquent leurs preuves ou sont tout simplement des imposteurs, finissent le plus souvent par sortir de la littérature scientifique, mais pas toujours.

Pour lui, la fraude et le secret constituent les deux périls de la science. Seules les mathématiques - un résultat est vrai ou faux - ignorent ces problèmes de fabrication et de falsification ainsi que la physique qui mobilise des outils gigantesques comme les accélérateurs de particules.

Entre l’histoire des sciences, la sociologie de la découverte et l’anthropologie du savoir, Nicolas Chevassus-au-Louis montre que cette citadelle internationale que certains voyaient comme le dernier refuge de la probité subit les mêmes pressions et utilise les mêmes méthodes que les industries automobile ou agroalimentaire. Ainsi, 2 % des scientifiques reconnaissent avoir inventé ou falsifié des données.

Pour plaire à ceux qui financent les recherches il faut publier de plus en plus. Le fameux "publish or perish" lancé par le premier directeur du CNRS en 1939 n’a jamais été autant d’actualité. Pourtant, Nicolas Chevassus-au-Louis voudrait bien retrouver ces labos qu’il a tant aimés, au service d’une science qui prenne vraiment le temps de penser. L. L.

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