Lundi 25 avril, à la Foire du livre de Buenos Aires et dans le cadre de Buenos Aires, capitale mondiale du livre, l'Union Internationale des éditeurs a décerné le prix Liberté de publier au vietnamien Bui Chat et à sa maison, Giay Vun Publishing.
Jusqu'au dernier moment, le lauréat n'était pas connu. Le 18 avril dernier, l'UIE avait mentionné l'appartenance asiatique du récipiendaire, mais ne souhaitait pas dévoiler son nom afin qu'il puisse quitter son pays sans contraintes.
En recevant son prix, Bui Chat a déclaré que « les livres avaient le pouvoir de rendre le monde libre ; (...) nous espérons que ce prix sera un déclencheur significatif pour le développement d'un secteur de l'édition indépendant et pour la société civile au Vietnam. »
Depuis presque 10 ans, Bui Chat a publié de nombreux poètes vietnamiens, dont les textes défiaient la censure gouvernementale. Bui Chat est aussi membre, entre autres, du groupe contestataire Ouvre ta bouche (Mo Mieng), qui organisait des lectures poétiques et des distributions publiques de poèmes interdits : pour cela, il fut emprisonné deux jours en 2004 avec le poète Ly Doi.
En 2005, il a notamment édité une anthologie de la poésie d'avant-garde par 23 auteurs (Khoan, cat bê tông) et deux ans plus tard, celle-ci a été complétée par un ouvrage similaire, signé de 47 auteurs (Co ji dùng ji - co nay dùng nay). Il a aussi initié un mouvement libérateur en appuyant et aidant la création de nombreuses maisons d'éditions indépendantes, publiant des auteurs et historiens souvent bannis. L'émergence de nouveaux penseurs, poètes et écrivains a été saluée par Björn Smith-Simonsen, président du comité Liberté de publier à l'UIE. « La maison d'édition et son fondateur ont été capables de restaurer la foi dans l'expression et la liberté de publier auprès d'une nouvelle génération vietnamienne. »
En septembre dernier, l'éditeur Chu Hao avait rencontré des problèmes avec la censure pour avoir publié sous son vrai titre De la Démocratie en Amérique d'Alexis de Tocqueville. Il y a un peu plus d'un an, l'UIE avait déjà alerté l'opinion à propos de l'interdiction de publier de Da Nang Publishing House, qui avait imprimé Dragon de pierre de Vo Ngoc Tien et Le Mai. En 2005, le directeur de Hai Phong Publishing avait du démissionner pour avoir fait paraître un livre critiquant le Parti Communiste Vietnamien.
Le prix Liberté de publier a précédemment récompensé les éditeurs Shalah Lahiji (Iran), Trevor N'cube (Zimbabwe) et Ragip Zarakolu (Turquie), les fondateurs de l'OLPEC Sihem Bensedrine, Neziha Rjiba et Mohamed Talbi (Tunisie), le rédacteur en chef Israpil Shovkhalov et son éditeur Viktor Kogan-Yasny (Tchétchénie). Le primé reçoit un chèque de 5 000 Francs Suisses (3 900 €).