La finesse psychologique a toujours été l’une des grandes armes d’Helen Dunmore. La romancière anglaise fait un retour dans les librairies françaises, cette fois sous la couverture bleue du Mercure de France. Il faut se glisser dans Le mensonge deDaniel Branwell. Un opus mystérieux, dont le héros rapièce son pantalon et plante des légumes.
Daniel Branwell s’est établi dans une maison laissée par Mary Pascoe, une vieille femme qu’il a enterrée à la lisière de son terrain. Le héros d’Helen Dunmore trait la chèvre et boit son lait. Il attrape des maquereaux aux abords des rochers avec sa canne à pêche, songe à vendre des bouquets de violettes pour gagner un peu d’argent, écoute le grondement des vagues qui se fracassent au pied des falaises.
Le lecteur apprend peu à peu des choses sur lui. Après la mort de sa mère, Daniel a été aide-jardinier, puis il s’est engagé dans l’armée, a combattu en France pendant la Première Guerre mondiale. Jamais il n’a oublié les heures passées avec Frederick, son ami, devenu son frère de sang une fois leurs sangs mêlés justement en prononçant les paroles du Livre de la jungle de Kipling et en utilisant un canif à sept lames.
Frederick, lui, n’est pas revenu de la guerre. A mesure qu’il laisse filer les jours, Daniel cogite. Il glisse qu’il est un lâche, qu’il l’a prouvé… L’auteure d’Un été vénéneux (Belfond, 1998) et de La maison des orphelins (Belfond 2007, repris en 10/18, 2010) installe page après page un climat étrange qui vous attrape comme une toile d’araignée. Des mensonges et des secrets, il n’en manque pas ici. Jusqu’au couperet final. Du grand art. Al. F.