Une fois par mois, une quinzaine d’experts spécialistes de l’édition numérique se réunissent à l’atelier "normes et standard", au Syndicat national de l’édition, pour travailler sur l’accessibilité de l’ePub 3 aux lecteurs handicapés. "Nous avons entamé notre deuxième année de travail sur le sujet, avec un programme notamment consacré aux aspects techniques de la diffusion des métadonnées Onix spécifiques à ces fonctions dans les livres numériques, pour faciliter leur recherche et leur identification dans les librairies Internet", explique Luc Audrain, animateur de cet atelier, et par ailleurs responsable support à la numérisation chez Hachette Livre.
L’objectif est de fournir un document pratique à l’usage de l’ensemble des éditeurs. Une première restitution des travaux précédents sur la "production d’ePub nativement accessibles aux publics empêchés de lire" est disponible sur le site du SNE. Un livre numérique ainsi conçu peut être écouté en voix de synthèse, une fonction maintenant disponible sur de nombreux environnements de lecture, ou transcrit sur un afficheur braille connecté à un ordinateur ou un smartphone, sans aucun travail d’adaptation supplémentaire.
Aujourd’hui, la plupart des fichiers de livres numériques doivent être repris et adaptés pour être utilisables par des lecteurs handicapés, une tâche accomplie par des associations, bibliothèques ou organismes publics, qui ne peuvent couvrir toute l’offre éditoriale en raison de son abondance, ni répondre à la demande du public concerné. "Nous vivons dans une famine de livres", ont ainsi expliqué des lecteurs handicapés reçus par le groupe d’experts. A chaque rentrée littéraire, la moitié des titres sont accessibles, souvent avec un délai. Au total, 5 à 10 % seulement de la production annuelle en France serait adaptée.
Incluse dans la loi création du 7 juillet 2016, l’extension de l’exception handicap oblige les éditeurs à fournir leurs fichiers dans un format simplifiant ce travail d’adaptation. Une directive européenne va également renforcer ces normes. Mais, au lieu d’agiter la menace de ces contraintes, le SNE souligne plutôt les enjeux économiques : les livres adaptés fournis par les associations sont gratuits pour leurs adhérents. Si les éditeurs proposaient eux-mêmes des ePub accessibles, ils s’adresseraient directement à un marché potentiel de 1,7 million de personnes - dont 200 000 aveugles et plus de 900 000 malvoyants.
"Pour les livres de texte seul, la réalisation de tels fichiers est relativement simple, et elle permet aussi d’améliorer la productivité et la qualité de l’ePub 3", souligne Luc Audrain. Pour en donner un exemple concret, l’atelier a produit selon ces "bonnes pratiques" le livre blanc E-accessible knowledge et a traduit en français la documentation technique de l’International Digital Publishing Forum. Hervé Hugueny