2 mai > Roman France > Romain Puértolas

Paru en 2013, L’extraordinaire voyage du fakir qui était resté coincé dans une armoire Ikea est l’une des plus féeriques aventures éditoriales de ces dernières années. Premier roman d’un jeune inconnu (38 ans à l’époque), publié chez un petit éditeur indépendant, il est devenu un best-seller planétaire: 300 000 exemplaires vendus en grand format, autant au Livre de poche (depuis mars 2015). Et la sortie mondiale fin mai de son adaptation "anglo-indienne" au cinéma par Ken Scott devrait relancer la machine.

Puértolas, graphomane qui s’était entre-temps lancé dans d’autres aventures littéraires plus ou moins réussies, en profite pour réactiver son héros, Ajatashatru Lavash Patel, resté en France, marié avec sa chère Marie Rivière, et devenu un richissime écrivain à succès. Ce qui ne lui a pas fait oublier d’où il vient, de son Rajasthan natal, et de la plus sombre misère. Aja, comme on l’appelle, vient justement d’envoyer son nouveau roman à son éditeur, Gérard François. Lequel, peu enthousiaste, estime son auteur trop "intégré", voire "embourgeoisé". Effondré, humilié, il se lance alors dans un autre projet: raconter ses années de jeunesse, en Inde, et son apprentissage, atroce, du métier de fakir auprès de l’ignoble Baba Ohrom, sadique, violent, cupide, arnaqueur, charlatan et pervers sexuel. Le genre de type qu’on préfère oublier, condamné à la prison à perpétuité, en théorie.

Parallèlement, pour revenir à ses fondamentaux, Aja décide de dormir à nouveau sur un lit à clous… introuvable chez Ikea France. Le voilà qui s’envole donc pour la Suède, afin de rencontrer "Monsieur Ikea" en personne, et de lui acheter ce meuble un peu spécial. S’ensuivra une avalanche de péripéties plus burlesques les unes que les autres, de quiproquos, de rebondissements invraisemblables et de calembours potaches, dignes des San-Antonio de la grande époque.

Mais le propos va au-delà. Aja, tentant de rentrer en France, se retrouve bloqué à la frontière belge, en compagnie de migrants syriens clandestins, refoulés, qu’il va aider de sa magie. Leur situation va lui inspirer la fin de son roman, et le thème du suivant: et si, à son tour, l’Europe était à feu et à sang, et si c’étaient les Européens qui devaient s’enfuir au Moyen-Orient et en Afrique, accepteraient-ils d’être traités aussi inhumainement qu’ils traitent les actuels demandeurs d’asile qui frappent à leur porte?

Ce sera le sujet du dernier volume de la trilogie du fakir au grand cœur, prévu pour dans deux ans. Jean-Claude Perrier

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