Kyril Bonfiglioli est un pur produit de la culture britannique : diplômé d’Oxford, devenu marchand de tableaux, c’était avant tout un dandy excentrique et professionnel, qui a goûté à tous les plaisirs terrestres. Il est mort d’une cirrhose, à Jersey en 1985, à 57 ans. Il est l’auteur d’une trilogie romanesque, dont le héros, Charlie Mortdecai, lui ressemble. Elle est rassemblée aujourd’hui en un volume aux éditions du Masque, pour cause d’adaptation cinématographique annoncée le 21 janvier. Les trois volumes ont été publiés en Grande-Bretagne en 1973 (Don’t point that thing at me), 1976 (Something nasty in the woodshed) et 1979 (After you with the pistol). Le premier et le troisième avaient été traduits en français au Masque en 2004 (Cachez-moi ça) et en 2008 (Après vous, avec le flingue). Le deuxième, Une affaire pas très catholique, était inédit.
Il serait vain de tenter de résumer les mésaventures du héros, fils de baronnet snob et tory, devenu marchand de tableaux sans scrupule, qui passe son temps à flemmarder et à boire du thé, quand il ne vole pas. Secondé par son fidèle Jock (nom de famille : Strapp), un voyou baraqué, qui a l’art de se mettre tout le monde aux trousses, policiers, CIA et FBI, tueurs chinois, et même sa femme Johanna, qui n’hésiterait pas à le sacrifier pour un Rouault (faux, de surcroît).
Mortdecai est un cocktail de James Bond, Mister Bean, Wodehouse et des Monty Python, étourdissant de culture, épuisant d’érudition, consternant de snobisme, une tête-à-claques sauvée par une seule vertu : l’humour à froid. Cette cure de british nonsense, servie par une traduction magistrale, a de quoi réjouir les amateurs français. Précisons que chacun des épisodes peut se savourer séparément, même si plusieurs fils conducteurs les relient. Comme ce canari qui, lui, meurt à la fin. J.-C. P.