Les éditions Larousse annoncent qu’elles publieront 20 % de nouveautés en moins au premier semestre 2023. Baptisé « Revenir à l’essentiel », ce plan traduit la volonté de l’éditeur de davantage s’appuyer sur ses titres du fonds. « Trop de bons livres passent à la trappe, chassés par la nouveauté, alors qu’ils mériteraient parfois une continuité d’exploitation plus longue, confie Isabelle Jeuge-Maynart, P-DG de Larousse. Nous avons tous besoin, éditeurs et libraires, de calmer le jeu qui consiste à proposer toujours plus de nouveautés. »
Larousse a publié 560 nouveautés au premier semestre 2022, mais n’en lancera que 445 au premier semestre 2023. L’intensité de l’effort ne sera pas la même selon les catégories de marché. Premier segment de Larousse en valeur, les livres pratiques verront ainsi la publication de nouveautés reculer de plus de 25 %. « Aujourd’hui, le fonds représente un peu plus de 20 % des ventes de livres pratiques, nous pouvons progresser. Nous avons beaucoup de titres de qualité et à fort potentiel qui auraient toute leur place en rayon, même après quelques années d’exploitation », indique Ghislaine Stora, directrice générale adjointe de Larousse. A contrario, les nouveautés en jeunesse, segment sur lequel Larousse est encore petit et ambitionne de conquérir de nouvelles parts de marché, ne baisseront que de 15 %. Le segment des dictionnaires, qui repose déjà largement sur le fonds, n’est quant à lui pas concerné par cette cure d’amaigrissement.
Travailler le fonds comme de la nouveauté
S’il répond au besoin de rationaliser la production et de soulager des libraires submergés par l’abondance globale de l’offre éditoriale, ce plan présente aussi une part de risque bien identifiée par Larousse. L’éditeur publiera certes moins, mais il entend conserver la même visibilité en librairie, avec des stratégies adaptées à toutes les typologies de points de vente. Des PLV intégralement constituées d’ouvrages de fonds seront notamment déployées en GSA, une première pour ces réseaux habitués à tourner sur de la nouveauté. En librairie, des opérations transverses réunissant des titres des fonds parascolaire, pratique et beau-livre seront également menées autour de thématiques communes. « Nous avons besoin du soutien des libraires pour mettre en avant une partie de nos ouvrages de fonds comme des nouveautés, poursuit Ghislaine Stora. Pour les accompagner, nous avons procédé à une sélection de titres qui affichent des taux de retour inférieurs à 10 % et pour lesquels le potentiel de vente est très élevé. Je rappelle que le taux de retour moyen d’une nouveauté est de 22 %, les libraires ont tout à gagner à nous suivre. Ils prendront moins de risques avec un titre du fonds de notre sélection qu’avec une nouveauté, c’est là que réside notre pari. »
Larousse joue le rôle de poisson-pilote au sein du groupe Hachette Livre et regardera de près les résultats de sa nouvelle stratégie. Des outils de suivi ont été mis en place et permettront, si nécessaire, de corriger le tir. Si les libraires ne suivent pas, l’éditeur prévoit de revenir rapidement à son niveau de production originel. « Il n’est pas question de mettre en danger la maison, insiste Isabelle Jeuge-Maynart. Pour pérenniser cette nouvelle approche, l’adhésion des différents points de vente est essentielle. » Raison pour laquelle Larousse ne s’engage pas encore sur le nombre de ses nouveautés au second semestre. Les six premiers mois de 2023 seront décisifs.
En cas de succès, d’autres maisons d’Hachette Livre pourraient s’inspirer de l’initiative de Larousse. Pour mémoire, le Groupe a annoncé fin 2022 s’engager à réduire de 30 % ses émissions globales en carbone d’ici 2023. La baisse du nombre de nouveautés publiées chaque année fait partie des leviers pour atteindre cet objectif.