11 ET 25 OCTOBRE - HISTOIRE France

Guillaume Cuchet- Photo MARCHOUR/SEUIL

Il flotte comme un parfum de revenants cet automne. La Nouvelle Revue française nous parle des Fantômes et l'historien Guillaume Cuchet est allé à la recherche des Voix d'outre-tombe, à l'époque où le spiritisme faisait tourner les têtes autant que les tables. L'écrivain, lui, n'a pas besoin de ces stratagèmes. Les entretiens (Marcel Cohen, Jean-Claude Schmitt...) et les textes (Arthur Conan Doyle, Philippe Forest, Bernard Quiriny, Antoine Volodine...) réunis par Stéphane Audeguy sont autant de manières de parler des fantômes et de les montrer.

La littérature, la culture, la vie ne sont qu'une vaste maison hantée. Ce n'est pas Shakespeare qui dira le contraire... Mais que penser d'un pays, en l'occurrence le nôtre, qui s'est mis pendant plus de quinze ans à faire tourner les tables ? La réponse, nous la trouvons dans l'étude savante de Guillaume Cuchet. Cet enseignant à l'université Lille-3 Charles-de-Gaulle y explore dans le détail cette pratique venue d'Amérique, des soeurs Fox très précisément, qui furent les premières à tirer profit de ce dialogue avec les trépassés.

Dès lors, on traduit spiritualism par spiritisme et on adapte cette pratique dans la France des années 1850, en plein essor scientifique et technologique. Un homme incarne ce retour de l'irrationnel dans le rationnel. Il s'appelle Hippolyte Rivail et publie, sous le pseudonyme d'Allan Kardec, Le livre des esprits en 1857, la même année que Madame Bovary,Les fleurs du mal et la mort d'Auguste Comte.

Le succès est fulgurant. La France s'adonne aux excès de tables... tournantes. Hugo bien sûr, mais aussi George Sand, l'astronome Camille Flammarion et même Maurice Lachâtre, l'éditeur du Capital de Marx en France, se prennent de passion pour cette philosophie spirite. Guillaume Cuchet, qui a tout lu sur la question, raconte cet engouement : les premiers médiums français, l'embarras de l'Académie des sciences, la réaction de l'Eglise d'autant plus vive que le psychologue Pierre Janet y voit une démocratisation de la religion !

Au moment où s'installe le positivisme d'Auguste Comte, la France industrielle du second Empire développe des cercles spirites et Lyon devient la Mecque des conversations avec l'au-delà. Dans cet ouvrage passionnant, Guillaume Cuchet montre bien la mutation du rapport aux morts qui se produit alors dans une société française en pleine décomposition religieuse.

Kardec mort, les tables ne tournent plus. Les scandales, les supercheries et les escroqueries ont eu raison du spiritisme. Mais, surtout, les Américains viennent d'inventer un moyen plus extraordinaire encore pour communiquer : le téléphone...

Les dernières
actualités