18 AOÛT - ROMAN France

Michel Quint- Photo DAVID IGNASZEWKI-KOBOY/HÉLOÏSE D'ORMESSON

Ça commence comme une bluette, une romance éditoriale pour la critique people : en pleine Buchmesse de Francfort 2009, avec la Chine comme invité d'honneur, Florent Vallin, patron d'En Colère, une jeune maison d'édition française indépendant qui monte, fait la connaissance de la belle Lena Vogelsang, une aristocrate prussienne qui travaille pour l'omnipotente multinationale B. V. Ils craquent et passent plus de temps dans leur chambre d'hôtel que dans les halls d'exposition. Sauf que par Fitz, l'agent multicarte incontournable, on apprend que l'ogre B. V. s'offrirait bien le Petit Poucet français. Et que la comtesse en robe de soirée rouge aurait bien pu être mandatée pour, comment dire, "faciliter" l'opération.

A quelques encablures, dans le même hôtel, un couple d'éditeurs allemands au passé plus que douteux, des anciens de la RAF passés au NPD, Ilse von Hochplatz et Hermann Schulmeister, sont découverts surinés. Or, la nuit du crime, Lena a quitté les bras de Florent pour aller chercher un somnifère, et un couteau ensanglanté a été retrouvé dans ses affaires ! Comme presque tout le monde, elle détestait les deux autres. Serait-elle donc l'assassin ? Pour quel motif ? Et aime-t-elle sincèrement Florent, ou n'agit-elle qu'en service commandé ?

Voici déjà une intrigue à tiroirs, qui suffirait à bâtir un chouette roman décalé réservé aux happy few, où le petit monde de l'édition internationale serait vachardement croqué.

Pour un auteur ordinaire, mais pas pour un Michel Quint, dont les réserves d'imagination semblent inépuisables. La preuve : le thriller éditorial passe vite au second plan. Clémence, amie d'enfance, épouse de Florent (même s'ils sont séparés) et mère de leur fils Maxime, lui annonce qu'elle est en train de mourir d'une tumeur au cerveau et qu'avant de disparaître, elle tient à connaître la vérité sur les zones d'ombre de leur passé familial commun. Pendant la guerre, son grand-père Debaisieux fut-il un réquisitionné du STO ou un collabo, volontaire pour s'enrôler ? Jean Vallin, le père de Florent, qui avait recueilli Clémence orpheline, était-il en possession de documents compromettants à ce sujet ? Et est-ce pour cela qu'il aurait été assassiné en 1977 par la RAF (dite "Bande à Baader"), dans l'attentat qui a coûté la vie à Hans-Martin Schleyer, le "patron des patrons" allemands ?

Florent, épaulé par Zina, sa pétulante secrétaire, roumaine et polyglotte, va mener, des deux côtés du Rhin, une enquête douloureuse et compliquée, dont les résultats ne vont pas lui faire très plaisir, et au cours de laquelle va réapparaître, natürlich, Lena Vogelsang, la comtesse rouge.

Voilà pour la trame principale, mais il y a encore, dans ce roman, plein d'intrigues adventices, de personnages annexes, et d'inventions plus ou moins crédibles. Michel Quint, écrivain en liberté, en fait des tonnes. Certains auteurs labourent jusqu'à épuisement la même petite parcelle souffreteuse, lui, c'est l'homme des Effroyables jardins croulant sous un déluge de mots. Certains vont aimer. D'autres, peut-être moins. Ce premier livre aux éditions Héloïse d'Ormesson, en tout cas, ne laissera pas indifférent.

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