Saluée par Bret Easton Ellis et par Don DeLillo, Dana Spiotta a été découverte quand les éditions de l’Aube ont fait traduire en 2003 son premier roman, Elles à L.A. On l’a ensuite retrouvée chez Actes Sud, avec Eat the document (2010) et le présent Stone Arabia. Où celle qui enseigne à l’université de Syracuse, dans l’Etat de New York, se montre meilleure que jamais.
Voici l’histoire d’un frère et de sa sœur cadette, de Nik et de Denise. A dix ans, le premier a reçu une guitare de son père - un père qui apparaissait et disparaissait, ressemblait à un acteur de seconds rôles des années 1950 - tout en prenant de plein fouet Quatre garçons dans le vent. Gamin, il créait déjà des fanzines, donnait des noms à tout au lycée, à «sa voiture, son école, ses groupes, ses amis», et commençait à tenir des «Chroniques» jamais censées «refléter les événements réels ou la vraie vie».
Dana Spiotta met aussi en scène une Denise de quarante-sept ans à Los Angeles. Soit une femme angoissée par le temps qui passe et attirée par les obsessionnels. Une femme qui travaille comme «secrétaire. Ou assistante. Enfin responsable administratif chez Greer Properties». Qui fréquente un professeur d’histoire de l’art rencontré au marché bio de Fairfax, Jay, avec lequel elle débat des films de James Mason et boit «un vin blanc sec qui n’[a] rien de romantique».
Denise, qui s’occupe de sa mère mourante, a une fille désormais établie à New York, Ada, dont elle est la seule et unique confidente. La jeune fille est fascinée par son excentrique oncle Nik et envisage de réaliser un film sur lui. Un Nik « aussi obstiné qu’un chien qui court après une voiture qu’il ne rattrapera pas, ou après une balle qu’il ne se fatiguera jamais de rapporter ». Un Nik qui n’a jamais molli sur les cigarettes, l’alcool et les drogues, s’autoproduit inlassablement en ne cessant d’explorer les sons…
Il y a dans Stone Arabia un charme et une mélancolie incroyables. Une sensibilité à fleur de peau. La marque d’une écrivaine à suivre de près.
Al. F.