Chine

Jeunesse : l'édition française de retour à la Foire de Shanghai

Le stand France, sur la CCBF 2024, qui s'est tenue du 15 au 17 novembre - Photo DR LH

Jeunesse : l'édition française de retour à la Foire de Shanghai

La Foire du livre jeunesse de Shanghai (CCBF), qui s'est terminée le 17 novembre, a vu le retour des éditeurs français sur un stand France commun, dans un contexte de baisse des achats de droits étrangers par les éditeurs chinois. 

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Par Judith Oriol
Créé le 19.11.2024 à 11h00

« Le marché en Chine a beaucoup changé pendant les années Covid », résume Nicolas Roche, directeur du Bureau international de l'édition française (Bief), depuis Shanghai où la 11ᵉ édition de la China Shanghai International Chidren’s Book Fair (CCBF), principale foire dédiée aux livres pour enfants en Asie, s’est déroulée du 15 au 17 novembre.

Les représentants de Bayard, de Nathan, de Glénat, d’Edi8, de Casterman, de L’École des Loisirs, des éditions Père Fouettard, de Versant Sud, et de Dargaud (qui bénéficie d’un bureau permanent à Shanghai) étaient accueillis, pour la première fois depuis 2019, sur un stand France de 90 m2, en marge d’un programme professionnel auquel Marion Glénat-Corveler, présidente du directoire des éditions Glénat, et Iris Declercq, responsable des droits étrangers de L’École des Loisirs, ont participé le 15 novembre. Des auteurs français étaient également du voyage, Paul Martin et Camille Roy à l’invitation de leurs éditeurs chinois, et Cécile Alix à l’invitation de l’ambassade de France en Chine.

De moins en moins de titres français

Longtemps considérée comme un eldorado pour le livre français en traduction, la Chine achète de moins en moins de titres français, et étrangers en général, depuis 2017. Pourtant, le mandarin reste la première langue de cession de droits (la seconde avec les coéditions) pour les éditeurs tricolores. Plus de 57% des livres français acquis en Chine en 2023 étaient des livres jeunesse, ce qui en fait le segment-locomotive des cessions de droits chinois, loin devant les SHS, la BD et la fiction. La Chine trouve dans la production jeunesse française ce qui lui manque, alors qu’elle produit encore essentiellement des contenus orientés sur l’éducation, héritiers de la politique de l’enfant unique. Et il est à l’évidence plus aisé pour les livres pour enfants de répondre aux exigences du contrôle exercé, avant toute publication, par les autorités chinoises.

Cette position privilégiée des collaborations franco-chinoises en jeunesse fait de la CCBF un rendez-vous important pour les acteurs du secteur. Cette édition a signé le retour d’une participation française dans sa configuration antérieure à l’épidémie de Covid, après quatre éditions chaotiques. Qu’ils aient pallié les restrictions de mobilité, pendant ces années de fermeture, en usant de technologies adaptées à la distance ou qu’ils aient été contraints de privilégier des marchés plus accessibles, les participants ont tous insisté sur l’importance de leur présence à Shanghai cette année. Les liens virtuels ne remplacent jamais, surtout en Asie, une rencontre physique pour une bonne compréhension d’un marché complexe et concurrentiel, secoué par les difficultés auxquelles sont confrontés les éditeurs chinois, depuis les répercussions de la crise économique ou de la baisse de la natalité, jusqu’aux injonctions à siniser leurs contenus, en passant par la concurrence déloyale des plateformes digitales où se font, à prix cassés, plus de 80% des ventes de livres.

Soutien chinois 

La CCBF, qui se positionne d’autant plus comme une foire internationale qu’elle est coorganisée par la Foire de Bologne depuis 2018, n’a pas ménagé ses efforts pour faire revenir les éditeurs étrangers à Shanghai, prenant en charge leurs nuits d’hôtel. Le BIEF s’est également adapté en proposant des tarifs préférentiels aux participants et l’Ambassade de France en Chine a soutenu financièrement l’opération.

Sans ce soutien, les éditeurs français auraient-ils entrepris ce voyage jusqu’à Shanghai ? « Oui, Nathan travaille depuis plus de 30 ans avec la Chine, l’ADN de notre catalogue matchant particulièrement bien avec l’éducation à la chinoise », répond Marie Dessaix, responsable des droits étrangers des éditions Nathan. « Non, ce déplacement a un coût important et il est évident que nous n'aurions pas pris de stand si nous n'avions pas reçu un coup de pouce des organisateurs », répond Florent Grandin, cofondateur des éditions Père Fouettard. Pour les éditions Glénat qui participent pour la première fois à la CCBF, cette opportunité est un premier pas vers une stratégie de présence plus fréquente sur les différents salons chinois.

Si la participation française à la CCBF n’a pas retrouvé son niveau d’avant-Covid, la curiosité demeure de part et d’autre, dans une configuration où la France et la Chine ont intérêt à collaborer sur le front du livre jeunesse. Les éditeurs français peuvent difficilement se détourner de l’immense marché que représente encore la Chine ; les éditeurs chinois peuvent difficilement se détourner de la production française, riche et diversifiée, pour poursuivre leur combat, puisque c’en est un dans un contexte politique et économique qui ne les incite pas à publier des livres en traduction.

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