Série d'été 2022

Ingénieuses médiathèques : à Paris, un futur fablab haut de gamme sur 100m2 [4/6]

Le Corolab : Impression 3d de visière pendant le confinement - Photo Quentin Chevrier

Ingénieuses médiathèques : à Paris, un futur fablab haut de gamme sur 100m2 [4/6]

C’est une mission que l’Unesco donne aux bibliothèques : favoriser l’épanouissement créatif, stimuler l’imagination, contribuer à faire connaître la patrimoine culturel et les progrès scientifiques. Et c’est le propos des médiathèques qui investissent dans les laboratoires de fabrication numérique, les fameux fablab, que Livres Hebdo se propose d'explorer cet été. Le quatrième épisode de cette série s'arrête sur l'important projet de fablab de la médiathèque Marguerite Duras située dans le 20ᵉ arrondissement de Paris.

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Par Adriano Tiniscopa,
Créé le 28.07.2022 à 17h31

À la médiathèque Marguerite Duras, à deux pas du cimetière du Père-Lachaise dans le 20ᵉ arrondissement de Paris, toute l'équipe s'est appropriée le projet de laboratoire de fabrication numérique, le fameux « fablab », qui doit voir le jour en 2023. Le début des travaux est prévu au printemps prochain. L'établissement, l'un des plus grands du réseau de 67 bibliothèques parisiennes, est en train de déloger son fonds local installé au troisième étage et dédié à l'histoire du quartier pour y installer son espace de création numérique. Après la bibliothèque Robert Sabatier installée dans le 18e arrondissement, qui compte un petit espace de machinerie axé principalement sur la broderie, la médiathèque Marguerite Duras sera le deuxième établissement parisien à accueillir un dispositif de cette nature. Les bibliothécaires sont actuellement formés aux logiciels et aux machines pour se préparer à transmettre ce savoir-faire au public.

Un fablab au grand complet

Trois mois de travaux sont prévus pour sécuriser et adapter les locaux dont « un mois occasionnant la fermeture de l'établissement pour le gros œuvre », détaille Cyrille Jaouan, bibliothécaire et médiateur numérique à la médiathèque Marguerite Duras (Paris). Le fablab va être pleinement équipé : une imprimante 3D, un découpe vinyle pour la création de stickers, de signalétiques, etc., une machine de découpe et de gravure laser, une fraiseuse numérique CNC pour la découpe et la gravure de matériau comme le bois. Le laboratoire va également recevoir une brodeuse numérique, un scanner 3D, une presse à textiles, une thermoformeuse pour la création de moules en plastique. Mais aussi des plus petits éléments d'équipement tels que des « cartes Arduino », des pièces électroniques capables de programmer et de faire fonctionner des robots... Sans oublier les outils traditionnels, des scies, marteaux... « Ce qui n'a pas manqué d'étonner certains collègues », raconte en plaisantant Cyrille Jaouan. Au total, le budget pour le matériel est estimé à 30 000 euros et l'enveloppe financière prévisionnelle pour les travaux à 300 000 euros.

L'enjeu est à présent de trouver des fournisseurs et ce n'est pas une mince affaire. Car « s'il y a de l'offre, les prestataires ne sont pas habitués à travailler avec les collectivités et le cadre administratif et financier que cela nécessite », explique Cyrille Jaouan. Le projet est dans les tuyaux depuis quelques temps maintenant, mis en suspens par la pandémie de Covid19. Il a été déposé et validé en 2019 au budget participatif Paris 2019, une enveloppe municipale de la capitale dédiée aux initiatives des citoyens et pour les usagers. Paradoxalement, c'est aussi la crise sanitaire qui a fait redémarrer le projet. Car pendant le premier confinement, la structure Marguerite Duras de la Ville de Paris s'est transformée en un atelier de productions multi-tâches : textile et couture pour des blouses pour le personnel soignant, des masques en tissu, des visières imprimées en 3D... Ce qui a donné un visibilité certaine aux fablabs et à leur intérêt et leur nécessité en médiathèque. « Tout ça, nous l'avons fait sans les usagers, c'était assez frustrant », avoue Cyrille Jaouan.

Une démarche d'accompagnement vers l'autonomie

Ce savoir-faire numérique et la manipulation de machines telles que des imprimantes 3D paraissent ainsi, et le contexte pandémique l'a confirmé, un véritable outil d'autonomisation et de démocratisation du savoir-faire à destination des usagers. Pour Cyrille Jaouan le fablab est un véritable vecteur d'« empowerment », renforçant la capacité à agir des individus. Mais il ne faut pas griller les étapes : d'abord la découverte des machines-outils, ensuite des initiations aux machines et logiciels et « pour créer l'envie », puis des ateliers créatifs et numériques les samedis après-midi avec le fablab mobile qui se déplace de bibliothèque en bibliothèque à Paris. « À un moment on décide que tu es autonome quand l'équipe valide tes compétences », poursuit le bibliothécaire au service numérique. « Toujours avec le principe de gratuité », insiste le bibliothécaire, qui est cependant à nuancer en fonction des projets individuels, certains nécessitant une abondante matière première. Ainsi, dans certains cas, l'usager est invité à ramener son matériau.

Avec le fablab, et sans oublier les conférences, projections, rencontres et évidemment les collections, la médiathèque devient plus que jamais un véritable « tiers-lieu, un endroit de convivialité, d'égalité, d'accès au savoir, au savoir-faire, on manipule des concepts puissants ! », conclut Cyrille Jaouan.

 

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