27 août > Essai France

Des quatre, Gide n’est jamais allé en Inde. Mais, il en a rêvé autant que Loti, Michaux ou Malraux. Jean-Claude Perrier a placé ces mousquetaires du verbe sous l’égide du barbare. Historiquement, c’est le nom que les Grecs donnaient à ceux qui ne parlaient pas leur langue, les étrangers à leur civilisation. C’est aussi le nom que s’était attribué Michaux dans son Barbare en Asie. Malraux, qui s’y est rendu souvent, y avait trouvé le royaume farfelu rêvé à ses débuts. Quant à Loti, il fut dans cette Inde (sans les Anglais) comme chez lui. Sans êtres Indiens, tous ont saisi l’âme du sous-continent.

Jean-Claude Perrier, grand Voyageur de papier (Héloïse d’Ormesson, 2012) mais aussi grand voyageur tout court, se sent à l’aise dans ce domaine des dieux. "Ce qui m’a immédiatement et délicieusement dépaysé dans la religion hindoue, c’est, justement, sa profusion." Face à ce temple à ciel ouvert, il se sent "insuffisant", comme ses compagnons livresques, modestes et pudiques devant l’immensité d’une culture marquée par des divinités au nombre incalculable qui sont autant de repères que d’égarements. Pas étonnant que le zéro comme l’infini aient été perfectionnés en Inde…

Auteur d’une trentaine d’ouvrages, Jean-Claude Perrier a sillonné le monde au gré de ses curiosités. Voilà pourquoi il n’apprécie pas ce "vieux cafard de Léautaud" qui n’a jamais dépassé Fontenay-aux-Roses. Lui, à 24 ans, se rend en Inde. C’était à l’été 1981. "Je suis hindou comme je suis catholique : esthétique." Dans ses bagages, il a des livres, mais aussi des musiques, celle des Beatles ou de Ravi Shankar, dont il deviendra un ami.

Comme des barbares en Inde offre l’occasion de regarder autrement ces quatre auteurs. Dans cet essai nomade s’entremêlent aussi des souvenirs personnels, des pérégrinations, des rencontres dans une multitude qui vous dépasse et qui vous fait prendre conscience de cette limite. "Face à cet infini, chacun se choisit son Inde." L. L.

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