Le narrateur, Benjamin Chambertin, à la veille de ses 30 ans, vient de se faire plaquer par sa Julie, après sept années d’amour, apparemment. Il avait même été question de mariage. Mais la jeune femme, qu’il a dépucelée quand elle avait 14 ans, est partie pour un autre. Du coup, Benjamin va connaître la déprime, jusqu’à son anniversaire et sa rencontre avec Vanessa, qu’il s’en ira rejoindre à La Rochelle. Happy end pour un roman truffé de références cinématographiques : chaque (court) chapitre portant le titre d’un film, sans rapport particulier avec ce qui y est conté, et le héros travaillant dans le cinéma, comme administrateur sur des tournages. L’auteur, Jules Gassot, tourne lui aussi autour du cinéma, qu’il a étudié à New York puis à Bruxelles. Il vit à moitié en Bourgogne, et il a 31 ans. Là s’arrêtent, selon lui, les ressemblances avec son personnage. L’intrigue d’On a tué tous les Indiens est plutôt mince, et guère révolutionnaire. Mais l’intérêt de ce livre, c’est d’abord son écriture. Enlevée, avec quelques trouvailles : "J’ai l’impression d’être une parka", écrit Benjamin juste après son infortune, qu’il vit comme "un tsunami dans [ses] veines". Mais aussi quelques facilités et un relâché très tendance. Sans parler du name dropping, l’une des maladies du siècle depuis Bret Easton Ellis.
L’autre intérêt, c’est de se vouloir le reflet d’une génération. Des trentenaires bobos mal calés dans leur vie, adeptes de sexe, drogues et pas tellement de rock’n’roll, immatures et terrorisés par la perspective de vieillir, qui se réfugient dans de tristes fêtes pour s’étourdir un instant. De tout cela, Benjamin, pour soigner son tædium vitæ, use et abuse, sans parler de séances chez un psy pour tenter de guérir ses tentations suicidaires.
C’est à la fois drôle, pathétique, talentueux, horripilant, et l’on se perd parmi tous ces garçons interchangeables et sans consistance : Alexandre, Constantin, Gabriel… Benjamin/Jules, lui, peut devenir écrivain. J.-C. P.