Michael Peter Balzary, dit Flea (Puce, en raison de sa petite taille et de son poids plume), bassiste historique du groupe de rock californien les Red Hot Chili Peppers, n'est pas de ces stars vieillissantes qui décident un beau jour de raconter leur vie à un plumitif, afin que celui-ci la transforme en un livre plus ou moins intéressant, que le signataire découvre en général une fois imprimé et dont il assure mollement la promotion (quasiment jamais en France d'ailleurs, notre marché n'étant pas assez porteur). Non, Flea, c'est clair, est un gros lecteur depuis son enfance (il est né à Melbourne en 1962), et un écrivain.
Son autobiographie est très décomplexée, comme son titre l'indique, Ados sous acide. Il y revendique haut et fort son usage de tous les stupéfiants possibles depuis l'âge de 12 ans (son premier joint), sans avoir été vraiment un junkie. Il se présente lui-même comme « un toxico du dimanche ». Contrairement à Hillel Slovak, le guitariste, son « frère » (« J'étais fou d'amour pour Hillel », écrit Flea), mort d'une overdose en 1988 à l'âge de 25 ans. Flea y raconte surtout sa jeunesse aux États-Unis, foutraque, entre un père australien admiré mais distant et violent, qui retournera vite vivre chez les kangourous avec sa fille Karyn, une mère hippie pas affectueuse du tout, et un beau-père, Wild Walt, alcoolique et brutal, incontrôlable, mais musicien fan de jazz. C'est lui qui initiera le gamin, lequel se rêvera un temps trompettiste (son dieu, c'est Dizzy Gillespie). Flea se mettra par hasard à la basse, pour intégrer un groupe et commencer à tourner, avant de former les Red Hot Chili Peppers avec Anthony Kiedis, le chanteur, son alter ego, connu sur les bancs de l'école. Deux déconneurs, bringueurs, dragueurs, qui ont vraiment fait les quatre cents coups, surtout lorsqu'ils étaient sous l'emprise de quelque psychotrope ou substance illicite (du moins chez nous).
C'est son enfance et sa jeunesse qui constituent la matière d'Ados sous acide, préfacé poétiquement par la grande Patti Smith, laquelle insiste sur l'innocence de Flea, « sauvageon pied léger ». Anthony et lui le sont demeurés, apparemment, puisque les Red Hot, surnommés « les zinzins d'Hollywood », sont connus pour leur humour potache, leurs frasques et leur décontraction : n'ont-ils pas joué à poil, vêtus seulement d'une chaussette enfilée là où il faut ? Ça n'empêche que Flea, depuis l'album Californication (1999), est considéré comme le meilleur bassiste du monde. Il nous le racontera peut-être dans un deuxième volume, puisque celui-ci, clin d'œil, s'achève en 1982, juste avant la création du groupe ! Ce garçon, décidément, ne fait rien comme tout le monde. Son livre est épatant, sans complaisance, drôle et souvent émouvant. Un vrai livre d'écrivain.
Ados sous acide Traduit de l'anglais (États-Unis) par Valérie Le Plouhinec
HarperCollins
Tirage: 5 000 ex.
Prix: 20 € ; 336 p.
ISBN: 9791033908487