Pathos et politique. La logique de l'action politique est de servir le bien commun. Si les dirigeants n'agissent pas toujours dans ce sens, on pourrait penser que leur action a quelque fondement dans la raison. C'est compter sans le fait que les hommes sont des êtres de passion animés par des sentiments souvent irrationnels. Ainsi des peuples... Dans La géopolitique de l'émotion (Flammarion, 2008), Dominique Moïsi analysait déjà le monde à travers cette grille de lecture du pathos. L'intuition première du spécialiste des affaires internationales n'a rien perdu de son acuité. Aujourd'hui, la guerre est de retour en Europe avec l'Ukraine qui se bat depuis deux ans contre l'assaillant russe, le Moyen-Orient est plus que jamais une poudrière avec Israël qui mène un combat sans merci contre le Hamas en bombardant Gaza. Dans Le triomphe des émotions, Dominique Moïsi poursuit sa réflexion sur un monde façonné par la peur, l'humiliation, la haine. En Europe, qui eût cru possible l'agression de Poutine ? L'attaque terroriste du 7 octobre, « le 11-Septembre d'Israël », n'est-elle pas le fruit d'une coupable fuite en avant de Netanyahou et de son cynique refus d'envisager une solution à deux États ? Une chose est certaine : l'Occident n'est plus le centre du monde et sa vision n'est plus partagée par le Sud global qui, naguère humilié, peut se réjouir de ses déboires. Malgré un tableau plutôt sombre (un possible retour de Trump à la Maison-Blanche a de quoi inquiéter), il s'agit de se hisser à la hauteur de valeurs qu'on se doit de défendre, avec ce sentiment qui demeure : l'espoir.