Des idées pour se renouveler

"En France, nous manquons d’ouvrages précis sur des jardins spécifiques, comme les jardins publics parisiens." Aurélien Delanoue, Librairie du jardin des Tuileries - Photo Olivier Dion

Des idées pour se renouveler

En contact quotidien avec la clientèle, les libraires enregistrent une vive demande sur des segments encore peu ou pas exploités.

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Par Cécile Charonnat
avec Créé le 04.03.2016 à 01h00

Les libraires des rayons nature et jardins reconnaissent une diversification de l’offre éditoriale opérée depuis deux ou trois ans, notamment sur le potager, grâce à la démocratisation des nouvelles techniques biologiques. Cependant, de l’avis de ces professionnels, les éditeurs se font parfois moutonniers en se concentrant sur des sujets ultraexploités et en en délaissant d’autres qui mériteraient, vu la demande, d’être de nouveau explorés. "Il existe un effet de profusion sur certains sujets qui noie le reste de la production", constate Alain Renouf, fondateur de Lire au jardin à Tours. Conjugué à la difficulté des maisons à renouveler leurs approches, cet effet entraîne, selon Marie Sabourin, de la Librairie des Halles à Niort, la publication de "beaucoup de livres qui se ressemblent, qui ne donnent plus envie aux gens et qui finissent par les lasser et les détourner du rayon". Successeur de Françoise Simon à la Librairie du jardin des Tuileries, Aurélien Delanoue regrette également l’absence "de livres pointus et-ou originaux", et se voit contraint de recourir à l’édition anglo-saxonne pour satisfaire certaines demandes.

Au potager, les libraires pointent par exemple le manque "féroce" d’ouvrages sur la culture sous serre et sous abri. L’arrivée en mars de deux ouvrages sur le sujet, Cultiver sous serre et tunnel plastique chez Larousse et Cultiver ses légumes sous serre et autres abris publié par Ulmer dans sa collection "Je fais moi-même" et qui propose des techniques pour construire ses propres abris, devraient toutefois réparer cet oubli. Fondatrice de la librairie itinérante Les Chemins de traverse, qui rayonne de la région parisienne au Grand Ouest, Ariane Sentz note aussi l’absence d’ouvrages spécifiques sur les piments et les poivrons, ainsi que sur les techniques des maraîchers parisiens de la fin du XIXe siècle, qui reviennent au goût du jour depuis deux ans. Plus radicale que ses confrères, Véronique Gauduchon, directrice de La Bruyère vagabonde à Poitiers, a décidé de prendre la plume pour coécrire un Calendrier pratique des jardiniers (Métive) qu’elle ne trouvait pas dans ses rayonnages. "Ce genre d’ouvrage, certes un b.a.-ba mais ultraprécis et qui décrit mois après mois les travaux de saisons en incluant des pratiques naturelles, manque dans les poches des jardiniers et notamment des débutants", argumente la libraire.

Les professionnels peinent également à satisfaire leurs clients lorsqu’ils souhaitent des informations sur les plantations de bord de mer ou quand ils désirent des plans détaillés et des mises en situation pour aménager leur jardin. "Lorsqu’elle existe, l’offre est peu attrayante", déplore Ariane Sentz, qui pointe en outre la timidité de la production des livres dédiés à la décoration de jardins, une mode pourtant bien installée chez les Anglo-Saxons et portée en France par le mouvement du "faire-soi-même". Plus globalement, c’est tout le secteur des jardins d’ornement qui souffre d’une certaine pénurie. "En France, nous manquons d’ouvrages précis sur des jardins spécifiques, comme les jardins publics parisiens, cite en exemple Aurélien Delanoue. A contrario, les ouvrages offrant une vision générale font défaut sur certains pays étrangers, tels que l’Angleterre, l’Australie ou les Etats-Unis." L’exposition de L’Institut du monde arabe "Jardins d’Orient", qui se tiendra du 19 avril au 25 septembre, devrait toutefois ouvrir, pour cette partie du monde, de "belles perspectives", espère le libraire parisien.

Regorgeant d’idées, Aurélien Delanoue regrette aussi l’épuisement des livres de "grands paysagistes ou de grands noms de l’art floral". En dehors des roses, des orchidées et des ikebanas, les éditeurs s’aventurent peu sur les chemins des "azalées ou des rhododendrons, pourtant demandés", souligne le libraire, qui salue l’arrivée en avril de Pivoines (Ulmer), qui mêle botanique et histoire. Les flores de pays étrangers ou des Dom, tout comme les monographies par variétés de plantes, sont "trop souvent issues de traductions ou écrites par des journalistes, donc pas assez pointues pour les connaisseurs. Quoi qu’il en soit, l’offre est trop réduite", complète Ariane Sentz, consciente néanmoins que le public reste restreint pour ce genre de publication. d

04.03 2016

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