Des auteurs étrangers si proches

Rentrée littéraire de L'Olivier au Studio 28 avec l'éditeur Clément Ribes, la romancière Sally Rooney et Olivier Cohen, P-DG. - Photo Olivier Dion

Des auteurs étrangers si proches

Pour promouvoir auprès des libraires et des journalistes leur programme de littérature étrangère, stabilisé après plusieurs années de baisse, les éditeurs multiplient les invitations en France de leurs auteurs.

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Par Claude Combet,
Créé le 04.07.2019 à 15h08

Jamais libraires et journalistes n'auront vu autant d'auteurs étrangers venir à leur rencontre. Sur un marché de la littérature étrangère un marché en baisse, et dans un secteur qui revient cher en achats de droits et en traduction, les éditeurs se démènent pour faire émerger leurs romans de la rentrée. Les écrivains ont été nombreux à présenter eux-même leurs livres aux libraires lors des soirées de rentrée littéraire et au cours de tournées en France, ou, plus traditionnellement, sont venus en juin rencontrer la presse.

Déjà primés

Parmi eux quelques auteurs qui vont faire parler d'eux à cette rentrée comme l'Américain cheyenne Tommy Orange (Albin Michel) dont Ici n'est plus ici a été sacré meilleur roman de l'année par la presse américaine, finaliste du Pulitzer et du National Book Award (300 000 ventes). L'Italien Marco Missiroli (Calmann-Lévy) avec Chaque fidélité, qui vient de remporter le Strega Giovanni (il est encore en lice pour le Strega) et est en cours d'adaptation par Netflix, la Suisse alemande Dana Grigorcea pour La dame au petit chien arabe (Albin Michel) et le Néerlandais Tommy Wieringa pour Sainte Rita (Stock) ont participé à la réunion de rentrée littéraire de leur éditeur. De même l'Italien Paolo Giordano, l'auteur de La solitude des nombres premiers (Dévore le ciel, Seuil), le Suédois Steve Sem-Sandberg, Médicis étranger 2 016 (Lettres de pluie, Laffont), les Américains Kristen Roupenian (Avoue que t'en meurs d'envie, Nil) et Joshua Cohen (David King s'occupe de tout, une « Jewish comedy », Grasset) et la Chinoise Zhang Yueran, traduite pour la première fois en français (Le clou, Zulma).

D'autres écrivains sont venus en juin rencontrer les journalistes comme la Britannique Diana Evans (Ordinary people, Globe, meilleur livre du New Yorker 2018 et shortlist Woman's Prize 2019) et l'Indien Amit Chaudhuri (Ami de ma jeunesse, Globe). Les Américains James Frey, pour Katerina (Flammarion), Pete Fromm (La vie en chantier, Gallmeister), Sana Krasikov, considérée comme l'un des 20 meilleurs jeunes auteurs de la décennie (Les patriotes, Albin Michel), l'éditeur de Knopf, Andrew Ridker, pour son premier roman, Les altruistes, en cours de traduction en 17 langues (Rivages) ont fait un passage à Paris tout comme la Canadienne Miriam Toews (Ce qu'elles disent, Buchet-Chastel, vendu dans 13 pays).

Gallimard a fait venir en juin l'Américaine Regina Porter pour son premier roman Ce que l'on sème, et invitera en septembre le Britannique Jonathan Coe (Le cœur de l'Angleterre) et l'Autrichien Arno -Geiger (Le grand royaume des ombres). Deux Chris Kraus participent à cette rentrée. La première, chez Flammarion, éditrice américaine de la maison indépendante Semiotext(e) et fondatrice de Native Agents, spécialisée dans les écrits de femmes, s'était fait remarquer avec I love Dick et revient avec Dans la fureur du monde. Le second est un auteur et réalisateur allemand, traduit pour la première fois en France, qui signe La fabrique des salauds, chez Belfond.

Le pari des étrangers

Si le nombre de romans étrangers est quasi identique à celui de la rentrée 2018 (188 contre 186), certains éditeurs ont misé uniquement sur la littérature étrangère comme la Table ronde-Quai Voltaire et Denoël. Tandis que Mauconduit et Globe, qui investit désormais le champ de la fiction, font leur première rentrée étrangère.

Comme chaque année, certains premiers romans sont devancés par leur réputation. Conversations entre amis de l'Irlandaise Sally Rooney (L'Olivier), âgée de 26 ans, incarne une nouvelle vague irlandaise issue notamment de la revue The stinging fly. Venus d'Irlande également, Paula McGrath (Quai Voltaire) avec La fuite en héritage et Arja Kajermo (Do) avec L'âge du fer. La littérature anglo-saxonne s'ouvre depuis quelque temps à une nouvelle géné-ration d'écrivains issus de parents émigrés comme : Anissa M. Bouziane, née d'un père marocain et d'une mère française (pour son premier roman, Sables, Mauconduit), Kapka Kassabova, née en Bulgarie (Marchialy), Sana Krasikov, née en Ukraine (Albin Michel), Ottessa Moshfegh, de père iranien et de mère croate (Mon année de repos et de détente, élu meilleur roman de l'année 2018 par Time, Fayard), Kamila Shamsie, originaire du Pakistan (Embrasements, Women's Prize for Fiction 2018, Actes Sud).

Certains titres arrivent déjà auréolés d'un grand prix littéraire étranger. On trouvera cet automne la lauréate du National Book Award 2018, Sigrid Nunez avec L'ami (Stock) ; celle du Women's Prize for Fiction 2019 de Tayari Jones (Un mariage américain, Plon). L'Allemande Christine Wunnicke (J. Chambon) a reçu le prix Franz-Hessel 2016 pour Le renard et le docteur Shimamura. Programmé aussi pour cette rentrée, F20 d'Anna Kozlova (Stéphane Marsan) distingué par le prix du Bestseller russe 2017. Sans oublier le succès de Dina Rubina, Du côté ensoleillé de la rue, vendu à 1 million d'exemplaires en Russie et traduit en 18 langues (Macha Publishing).

A côté des incontournables que sont Jonathan Coe (Gallimard), Siri Hustvedt (Actes Sud), Edna O'Brien (Sabine Wespieser), Joyce Carol Oates (Philippe Rey) et Audur Ava Olafsdóttir (Zulma) (voir ci-dessus), on trouvera Javier Marías et un roman posthume d'Antonio Tabucchi (Gallimard), Paulo Coelho (Flammarion) et Luis Sepúlveda (Metailié) avec un conte, et Paolo Giordano (Seuil). Les lecteurs retrouveront aussi le Suisse allemand Christian Kracht (Phébus), la Britannique Ali Smith (Grasset), les Américains Valeria Luiselli (L'Olivier), Benjamin Markovits (Bourgois), Dave Eggers (Gallimard), Jim Fergus (Gallimard), Seth Greenland qui fait son grand roman de l'Amérique avec Mécanique de la chute (Liana Levi) et Irvine Welsh (Au Diable vauvert).

Remarqués pour leur titre précédent, reviennent aussi le Britannique Jonathan Buckley (Le Castor astral), l'Israélienne Ayelet Gundar-Goshen (Presses de la Cité), la Libanaise Joumana Haddad (J. Chambon), l'Américain Joe Meno (Agullo), l'auteur du Sympathisant, Viet Thanh Nguyen, et la Sino-Américaine Yiyun Li (Belfond) et le Polonais Zygmunt Miloszewski (Fleuve éditions).

Curiosités

La rentrée 2019 contient aussi son lot de curiosités. Les lecteurs découvriront A. E. Hotchner, l'auteur de Papa Hemingway, avec Les étonnantes aventures d'Aaron Broom (Mercure de France), l'Espagnol Andrés Trapiello, qui, dix après A la mort de don Quichotte, poursuit les aventures du chevalier à triste figure avec Suite et fin des aventures de Sancho Panza (Quai Voltaire), les Américains Charles Plymell, avec Le dernier des mocassins, « le livre culte du dernier des beats » publié en 1971 et inédit en France (Sonatine), Earl Thompson, avec Un jardin de sable, sélectionné pour le National Book Award (paru en 1970) et Tattoo (Monsieur Toussaint Louverture), l'Anglaise Drusilla Modjeska avec Maunten, un roman épique sur la Papouasie-Nouvelle-Guinée en 1968 (Au vent des îles), et le Kurde Bakhtiar Ali, avec Le dernier grenadier du monde (Métailié).

Comme chaque année, la rentrée fait la part belle aux découvertes, avec des premiers romans : Cadavres exquis de l'Argentine Agustina Bazterrica (Flammarion), La passagère du Saint-Louis de l'Américain Armando Lucas Correa (Presses de la Cité), Villa Pirasol de l'Allemande Susan Kreller (Presses de la Cité), Kintu de l'Ougandaise Jennifer Nansubuga Makumbi et Daniel Saldana Paris (Métailié), Dégels de Julia Phillips (Autrement), L'été meurt jeune de l'Italien Mirko Sabatino (Denoël), L'âge de la lumière de l'Américain Whitney Scharer (L'Observatoire), Il était une fois dans l'Est du Slovaque Arpad Soltesz (Agullo), prix du Premier roman slovaque en 2017.

Delcourt Littérature joue aussi la carte des premiers romans avecIci tout est encore possiblede la Suisse alémaniqueGianna Molinari, prix Robert-Walser 2018, etUn autre tambourdeWilliam Melvin Kelley, publié au début des années 1960 alors que l'auteur n'a que 24 ans, et redécouvert par une journaliste duNew Yorkeren 2018, qui le considère comme «le géant oublié de la littérature américaine». Ajoutons l'EspagnolJorge Comensal(Les Escales), les GrecsKostis Maloutas(Do) etMaria Stefanopoulou(Cambourakis) ainsi que la Serbo-CroateJelena Bacic Alimpic(Dernier printemps à Paris, Serge Safran éditeur) traduite pour la première fois en France.C. C. 

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