Avant-portrait

De sa jeunesse dans le Sud-Ouest, à Toulouse et dans ses environs, il reste notamment à Denis Soula un accent chantant qu’il n’a jamais perdu, ni même cherché à gommer, alors qu’il a passé la moitié de sa vie à Paris où il habite avec femme et enfants. Il raconte qu’en amoureux de la capitale, comme seuls les provinciaux peuvent l’être, il est toujours aussi émerveillé de voir quotidiennement la tour Eiffel, en sortant des studios de la Maison de la radio où ce fou de musique travaille depuis vingt ans. En plein conflit social, entre deux AG, ce metteur en ondes, réalisateur de "Jazz à Fip", l’émission quotidienne de l’antenne, évoque le plaisir d’entendre les musiciens de l’Orchestre de Radio France venir, en petite formation, jouer pour les grévistes à la cafèt’ de cette "caverne d’Ali Baba" où, décrit-il avec affection, "il y a aujourd’hui encore une grande circulation des idées et des gens". C’est aussi un lieu où personne n’a jamais demandé de diplôme à celui qui a fait de nombreux petits boulots avant d’entrer à la Maison ronde, puis qui y a "tout fait". "A la radio, on ne monte pas : on s’approche du studio...", dit-il.

Homme de radio, donc, œuvrant hors micros, Denis Soula, qui publie son troisième roman, avoue qu’il a du mal à se considérer comme un écrivain. C’est un réservé qui marche à l’élan, à la pulsation. Il écrit court des histoires intimes et sobres, des livres dont la grâce n’est pas spectaculaire, mais qui se lisent d’un seul souffle.

Etre soi, être son

"Je n’ai pas des idées tous les jours, mais l’écriture j’y pense tout le temps, depuis que j’ai 16 ans." Si Les frangines est moins directement inspiré du monde de la musique que ses deux précédents romans, il y a dans le portrait de ce couple de sœurs dissemblables le tempo, une justesse dans les voix et les dialogues qui signalent l’écrivain travaillant à l’oreille. "Au départ, j’entends des voix, quelqu’un qui dit quelque chose." Ici, comme souvent, une voix féminine. Surtout, résume-t-il, "il faut que ça sonne". "Certains matins, quand j’écris, je mets de la musique. Dix minutes, un peu fort. Ça me met dans un état d’exaltation. Ça donne du rythme à l’écriture et, l’écriture, ce n’est que ça, non ?...quand on n’a pas beaucoup d’imagination."

Denis Soula se souvient d’une enfance à la campagne au grand air où "c’était rugby ou rien". Il a d’ailleurs consacré à ce sport quelques livres et des documentaires pour France Inter et France Culture. Comme sa très jeune mère "qui adorait le jazz et le rock", il a toujours aimé les deux. Mais ses goûts musicaux sont aussi éclectiques que la programmation de la station qui l’emploie aujourd’hui. Quand Denis Soula dit qu’il "aime, à la radio, le partage dans le travail" mais "qu’écrire c’est être soi ", on croit entendre "écrire, c’est être son". Ce qui, dans son cas, revient un peu au même.

Véronique Rossignol

Denis Soula

Les frangines

Editions Joëlle Losfeld

prix : 14,50 euros

sortie le 4 mai

ISBN : 978-2-07-258973-7

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