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Décès de Clément Rosset, le "penseur des chemins de traverse"

Clément Rosset - Photo TH. Bilanges / Minuit

Décès de Clément Rosset, le "penseur des chemins de traverse"

Le philosophe iconoclaste Clément Rosset est décédé mardi 27 mars, à l'âge de 78 ans.

Par Cécilia Lacour,
avec AFP Créé le 28.03.2018 à 19h00

Agé de 78 ans, "Clément Rosset a été retrouvé mort dans son appartement parisien le 27 mars 2018", a annoncé à l'AFP son éditrice Irène Lindon, présidente directrice générale de Minuit.
 
Né le 12 octobre 1939 à Carteret (Manche), Clément Rosset publie dès 1960 La philosophie tragique aux Puf. "Le premier acte catastrophique de [sa] carrière", assurait-il à Véronique Rossignol, dans un avant-portrait publié dans Livres Hebdo n°626 du 16 décembre 2005 à l'occasion de la sortie de Fantasmagories (Minuit).
 
Réfuter les illusions
 
En 1960, Clément Rosset entre à l'Ecole normale supérieure où il devient agrégé en philosophie. Sans jamais cesser de publier, il a enseigné cette matière durant 31 ans à l'Université de Nice avant de retourner définitivement à Paris, "dans un appartement de célibataire rempli de livres et de vinyles où le seul luxe technologique est une télévision au vaste écran".
 
Décrit comme un "penseur des chemins de traverse" par Véronique Rossignol, ce philosophe iconoclaste a entrepris de réfuter toutes les illusions que les hommes nourrissent au sujet du réel. Sur la métaphysique d'abord avec Le réel et son double (Gallimard, 1976) ou Le Réel. Traité de l'idiotie (Minuit, 1977). Puis sur la quête de soi dans Loin de moi. Etude sur l'identité (Minuit, 1999). Ses études se sont accompagnées de réflexions diverses sur le cinéma, la littérature et surtout la musique, laquelle occupa une place centrale dans sa vie et dans sa pensée.
 
Inclassable
 
Le style de Clément Rosset se caractérise par l'absence de jargon, sa grande clarté et son humour décapant. Peu chéri des universitaires – il mélange les citations de Kant et Hegel avec des répliques de Courteline et de Hergé –, et réticent aux communications académiques, ce penseur écrivain inclassable est cependant parvenu à se faire une place majeure dans la philosophie contemporaine internationale.
 
Clément Rosset, un philosophe "sans étiquette ni morale, […] à la notoriété discrète, dont la principale caractéristique est de donner au lecteur non spécialiste un agréable sentiment d'accessibilité", assurait alors Véronique Rossignol.
 
Auteur d'une quarantaine de livres, il a été traduit dans une douzaine de langues. Clément Rosset a notamment été récompensé du prix Procope des Lumières 2013 pour L'invisible (Minuit, 2012) dans lequel il s'est attaché, "avec sa langue toujours aussi imagée et fleurie, à ce qui n'existe pas mais qu'on croit exister: visions, hallucinations en tout premier lieu", commentait Fanny Taillandier dans son avant-critique publiée dans Livres Hebdo du 5 octobre 2012.

En mai 2012, Stéphane Vinolo a consacré un ouvrage à Clément Rosset: la philosophie comme anti-ontologie (L'Harmattan), soulignant l'utilisation par le philosophe des concepts les plus classiques de la philosophie mais en leur faisant subir un léger déplacement sémantique dans lequel reposent sa force et sa nouveauté.

Le 19 avril prochain, Encre Marine publiera le dernier ouvrage du philosophe: L'endroit du paradis, consacré à la joie de vivre.

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