C’est une affaire qui secoue les intellectuels italiens. Suite à l’exclusion de l’écrivain Roberto Saviano de la délégation italienne qui participera à la prochaine Foire internationale du livre de Francfort – dont le pays d’honneur est l’Italie –, une quarantaine d’auteurs et d’autrices ont dénoncé, dans une lettre ouverte parue fin juin, « l’ingérence, de plus en plus étouffante » de la politique d'extrême droite menée « dans les espaces culturels » par Giorgia Meloni, présidente du conseil italien.
Les signataires, parmi lesquels Sandro Veronesi (Chaos calme, Grasset), Viola Ardone (Le choix, Albin Michel) ou Silvia Avallone (Une amitié, Liana Levi), ont adressé le texte au directeur de la Foire de Francfort, Jürgen Boos, et au président de l’Association des éditeurs italiens, Innocenzo Cipolletta. Les auteurs y fustigent « la tentative maladroite [du gouvernement italien] d’expliquer l’exclusion par des raisons bureaucratiques », soulignant que « l’incident Saviano » n’est pas un cas isolé en Italie.
Les intellectuels, cibles de l’extrême droite
Au contraire, celui-ci s’inscrirait, d’après les auteurs, « dans une suite de tergiversations, de formes et de gravité différentes auxquelles nous assistons depuis deux ans et dont nous sommes souvent l'objet », parmi lesquelles « des formes plus ou moins explicites de censure », « des attaques personnelles visant à discréditer », ou encore « l'utilisation sans scrupules de procès contre des écrivains, des journalistes et des intellectuels par ceux qui sont en position de pouvoir ».
« Tout cela nous paraît inacceptable dans l’Europe à laquelle nous croyons. Et c’est inconciliable avec une saine expression de la démocratie », ont-ils ajouté, partageant leur inquiétude quant à l’avenir des autres pays, après les résultats des dernières élections européennes. Dans une interview pour Libération, Roberto Saviano, auteur de Gomorra (Gallimard), a d’ailleurs assuré que « la France est déjà dans une situation similaire à l’Italie », ajoutant que « la démocratie est délégitimée à chaque fois que l’on confond le profit de l’entreprise avec le profit social ».
À noter qu’en réponse à la lettre ouverte qu’il a reçue, Innocenzo Cipoletta a déclaré, en accord avec le commissaire de l’association Mauro Mazza, qu’il accueillait favorablement la demande des auteurs « d’ajouter des moments de débats aux occasions déjà identifiées », lors de la Foire du livre de Francfort.