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Confession d’un Basque

François-Xavier Delmas - Photo Thierry Rateau/Anne Carrière

Confession d’un Basque

François-Xavier Delmas retrace la vie de son saint patron ainsi que son propre parcours homosexuel dont le goût du martyre n’est pas sans rappeler les mortifications du jésuite.

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Par Sean James Rose
avec Créé le 25.05.2018 à 01h44

Le dîner à la maison était toujours un rituel d’un mortel ennui. Le père qui servait la soupe demandait à chaque membre de la famille s’il voulait "du dessus ou du dessous ?". Le pater familias autorisait ainsi à chacun d’exprimer sa préférence plutôt pour le bouillon ou pour les morceaux de la vespérale nage de légumes. Le conseiller d’Etat, même chez lui, ne se départait jamais de son sérieux: il donnait du "madame" à son épouse agacée et du "vous" à ses enfants mutiques.

Le narrateur, François-Xavier, est le benjamin de la fratrie. Hormis l’expression de son goût en matière de potage, il n’y a guère de conversation chez les Delmas. Un jour le père suggère au garçon, qui ne semble rien faire qui vaille dans sa vie, d’entreprendre d’écrire la vie de ce cofondateur de la Compagnie de Jésus et évangélisateur du Japon: n’est-il point d’origine basque comme eux et son saint patron?

A l’époque, le futur auteur de ce vif premier roman, Ma vie de saint, trouve l’idée saugrenue. De son natal Javier (que le saint accole à son prénom Frantzisko) à Goa ou au Japon ou aux Philippines, en passant par le collège Sainte-Barbe à Paris ou par Lisbonne, où il embarque pour l’Inde, voilà François-Xavier Delmas sur les traces du missionnaire, dont les membres sous formes de reliques sont éparpillés de par le monde. Car il s’agit là aussi bien de remembrement: reconstituer ce corps de saint du XVIe siècle espagnol (1506-1552), redonner chair à l’itinéraire aventureux du jésuite, que de remembrance, se souvenir de son propre chemin de croix sur la voie du corps et du désir. A savoir, de l’amour des garçons. Le biopic se double d’un récit de vit. Et les tribulations d’un Basque de devenir la Confession d’un masque, à la Mishima, un goût de la souffrance avec lequel l’esthétique du martyre chrétien n’est pas sans rapport. S. J. R.

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