Le ministère de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation veut en faire une pratique habituelle et quotidienne : la mise en libre accès des publications scientifiques. De 2021 à 2024, quinze millions d’euros sont chaque année mis sur la table pour ce plan national pour la science ouverte.
Le rôle des bibliothécaires universitaires est alors de sensibiliser les chercheurs à ce mode de publication, d’accompagner leur mise en ligne et de conserver les données produites. Avec des conséquences sur leur métier, ce sur quoi l’association des directeurs et personnels de direction des bibliothèques universitaires et de la documentation (ADBU) s’est penchée lors de son congrès, qui s’est tenu du 28 au 30 septembre.
Choisir et convaincre
Avant de mettre en accès libre les publications scientifiques, il faut d’abord définir une politique d’établissement qui met d’accord toutes les instances de pouvoir (direction générale des services, présidence, conseil académique…), choisir un modèle parmi les différentes “voies” (voie verte, où le scientifique publie une version de sa production non mise en page par un éditeur sur des archives ouvertes nationales telle que HAL ; voie diamant, où le scientifique publie en accès ouvert et sans frais dans des revues ou plateformes de publication financées en amont par l’université par exemple)... Et embarquer le chercheur dans ce chantier.
Les bibliothécaires deviennent donc accompagnants, leur fonction s'étoffant parfois du qualificatif “d’appui à la recherche”. Mais comme le souligne Jean-François Lutz, à la direction de la documentation de l’Université de Lorraine, « les équipes d’appui à la recherche doivent rester pleinement intégrées aux bibliothèques. Il y a un changement culturel, mais les compétences cœur de métier restent là et je ne veux pas que les bibliothécaires qui traitent ces questions soient des extarterrestres ».
Reconnaissance
Pour les bibliothécaires, la prise en main de la science ouverte n’a que du bien, remarque la conservatrice des bibliothèques Géraldine Barron, responsable d’appui à la recherche à l’Univeristé du Littoral Côte d’Opale : « Avant, la bibliothèque était seulement considérée comme un service pour les étudiants. Maintenant, on est enfin reconnus par les chercheurs comme un vrai service d’appui à la recherche.» « La science ouverte donne de la légitimité à notre service », rejoint Stéphanie Cheviron, data librarian à l’Université de Strasbourg.
Science participative
Les bibliothécaires se saisissent également de la mission de diffusion de cette connaissance auprès des citoyens. « Nos établissements s’emparent de plus en plus de la question de la science participative », confirme le président de l'ADBU et directeur des ressources et de l'information scientifique à Sciences Po Paris, Marc Martinez.
Dix-huit sites universitaires sont aujourd’hui labellisés « Science avec et pour la société » (SAPS) par le ministère, pour leur donner les moyens de valoriser la recherche auprès des scolaires notamment ou dans les médias, de former les chercheurs à la médiation scientifique et de faire participer les citoyens à la recherche. L’Université de Caen a par exemple créé cette année un prix finançant une équipe de recherche pour un projet portant une dimension de recherche participative. En cette rentrée 2022, elle a aussi lancé un Master Information médiation scientifique et technique, pour former de futurs médiateurs dans les musées.
Et les bibliothèques dans tout ça ? « Elles peuvent offrir des espaces informels qui ouvrent à la discussion », suggère Thierry Machefert, Vice-Président de l'Université de Caen-Normandie en charge de la culture et de la relation science-société. Des lieux d’ouverture, pour une science bel et bien ouverte.