Mater Dolorosa. « Être une criminelle. Charlotte s'y entraîne quotidiennement, quelles que soient ses tâches de la journée : courses, ménage, coups de fil, rédaction de courriers électroniques, pause-café au bistrot. » Quand Octave lui confie le premier rôle d'une pièce qu'il souhaite mettre en scène, Charlotte accepte de devenir Claire. « Tout se passe dans la cellule de cette femme. Dans la tête de cette femme » dont on ignore si elle a commis le crime pour lequel elle a été emprisonnée. Octave laisse à Charlotte la liberté de jouer une coupable ou une innocente. Un prisme à l'aune duquel le lecteur décrypte bientôt les faits et gestes des personnages de ce roman vénéneux, dont les parts d'ombre entrent en lutte avec la lumière, comme dans la composition d'un tableau.

Son tableau préféré, Charlotte l'a suspendu au-dessus du lit de son fils, Gabriel. L'Annonciation, de Simone Martini. « Dans les traits si purs de l'archange elle reconnaît son fils. Et la Vierge, qui est-elle ? Charlotte elle-même. » À 17 ans, Charlotte aimait Sylvain, un adorateur de Sid Vicious. À 19 ans, elle était enceinte de Gabriel. À la naissance de son fils, elle était seule, avec des dettes et des hématomes sur le corps. À la maternité, elle rencontre Sarah, dont le compagnon est décédé dans un accident de la route. Elle aussi vient de donner naissance à un garçon, prénommé Léon. Charlotte et Sarah deviennent inséparables, Gabriel et Léon meilleurs amis. Mais quand Gabriel rencontre Emmy, une étudiante aux Beaux-Arts dont les talents sont déjà reconnus, et s'installe avec elle, les liens unissant le quatuor se distendent, libérant les ressentiments, les jalousies et les colères. « Ton fils me fait peur, confie un jour Sarah à Charlotte. Il triche. Il ment. » Un pressentiment auquel Gabriel donne raison en commettant l'irréparable. Animée d'un amour maternel inconditionnel, Charlotte doit à son tour choisir de regarder son fils comme un coupable ou un innocent.

Autrice de romans, d'essais et de pièces de théâtre, Cécile Ladjali écrit et enseigne la littérature et la dramaturgie. À travers ses personnages, elle s'interroge sur la dimension tragique de la féminité et de la maternité, dans laquelle Charlotte semble s'être laissée enfermer. Méditation mélancolique et d'une fulgurante beauté sur l'incarnation du mal et la possibilité du pardon, Repentir convoque des figures théologiques et mythologiques, dont l'évocation enrichit le récit de différents niveaux de lecture, tout en laissant au lecteur sa liberté d'interprétation.