Bilan

Bologne 2017: un modèle de foire professionnelle

A la Foire de Bologne 2017 - Photo Bologna Children's Book Fair

Bologne 2017: un modèle de foire professionnelle

La 54e Foire du livre de jeunesse de Bologne s'est déroulée du 3 au 6 avril dans une ambiance à la fois studieuse et chaleureuse, offrant toutes les facettes du métier, de l'artistique à l'économique.

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Par Claude Combet Bologne,
Créé le 06.04.2017 à 18h34

"Une foire très business, mais sans scoop", c'est ainsi qu'Hedwige Pasquet, directrice générale de Gallimard Jeunesse, définit la 54e Foire du livre de jeunesse, qui s'apprête à fermer ses portes ce 6 avril. Si la Foire ne s'agite plus guère autour de livres ou de projets, elle n'en reste pas moins un grand rendez-vous pour les éditeurs jeunesse du monde entier, qui y recherchent toujours la créativité française et la French touch. Bologne, un modèle de foire professionnelle? On peut le penser, puisque la Foire a annoncé lors d'une conférence de presse, le 4 avril, l'exportation de son modèle à New-York.

C'est à Bologne que se font les grandes annonces. Les éditions Albert René et Hachette ont fait leur traditionnelle conférence de presse pour annoncer la sortie mondiale du 37e album d'Astérix devant journalistes et éditeurs du monde entier, sous les applaudissements des Italiens, l'album se déroulant dans la péninsule. On y a fait le point sur le numérique et les derniers progrès de la réalité augmentée lors de la Master Class "Dust or Magic" et des "BolognaRagazzi" numériques. Bayard a présenté son application Bayam sur son stand et dans l'espace numérique; l'américain Scholastic, l'espagnol Planeta, des éditeurs coréens et taïwanais se sont déplacés. C'est aussi l'occasion de célébrer les auteurs: les français Hervé Tullet et Blexbolex ont eu leur dîner avec tous les éditeurs étrangers, organisés respectivement par Bayard et Albin Michel.

Illustrateurs à l'horizontale

Bologne, c'est avant tout l'illustration. Côté professionnels, Elena Pasoli, directrice de la Foire du livre de jeunesse, avait prévu un coin dédié aux illustrateurs, où éditeurs et illustrateurs confirmés conseillaient les débutants sur la façon de présenter un portfolio aux éditeurs. Côté expositions, la Catalogne, région invitée, proposait une scénographie spectaculaire avec des hamacs présentant les dessins, tandis qu'Elena Pasoli a choisi de présenter la traditionnelle exposition des illustrateurs à l'horizontale, "à hauteur des mains et des yeux comme quand on lit un livre". Sans oublier l'exposition de pop-ups, à la fois patrimoniale et contemporaine.

Parmi les nombreuses expositions en ville, citons "La règle et le jeu", montée dans la bibliothèque de la Sala borsa par le Salon du livre de jeunesse de Montreuil, avec ses boîtes en Plexiglas où l'on passe les mains. "Adrian Parlange, Bastien Contraire, Beatrice Alemagna et Blexbolex étaient présents sur le salon avec une actualité, cela aide à vendre les droits. Les gens qui voient les expos sont contents de retrouver les livres chez nous", commente Aurélie Lapautre, responsable des droits d'Albin Michel Jeunesse.

Du côté de la fiction, le middle grade (8-12 ans) a définitivement pris le pas sur le young adult et les Anglo-Saxons se déchaînent. Comme pour Francfort, les titres sont envoyés avant la Foire et parfois les transactions sont conclues. Elles se seraient envolées cette année pour le livre pour les ados de l'égérie de Burberry Cara Delevingne, Mirror, Mirror, acheté par Hachette et par Orian aux Etats-Unis; ou encore pour Children of Blood and Bone, premier volet d'une trilogie fantastique sur fond d'affrontement raciste entre Noirs et Blanc, d'une primo-romancière de 23 ans, Tomi Adeyemi, qui a été acheté pour un montant à sept chiffres par l'Américain MacMillan.

"Comme il n'y a rien à se mettre sous la dent, les éditeurs pètent les plombs et achètent n'importe quoi en espérant que ça va marcher. C'est de la pensée magique", commente Glenn Tavennec, éditeur de Laffont, ajoutant, "mais on a eu aussi des suites ou de nouvelles séries d'auteurs confirmés pour les 8-12 ans, comme pour les jeunes adultes." A l'inverse, alors que l'agence littéraire Anna Jarota défendait une série de 7 titres Minecraft, Gallimard Jeunesse, qui a acheté les premiers, n'a pas suivi.

La "French touch" attire toujours

La French touch attire toujours. "Pour le Mary Poppins d'Hélène Duvert que nous venons de réimprimer pour la France, le Royaume-Uni et les Etats-Unis, nous avons aussi prospecté de nouveaux éditeurs européens, en Espagne, en Italie, aux Pays-Bas, en Belgique", souligne Anne Vignol, responsable des droits d'Hachette Jeunesse. "On sent un accueil de plus en plus mature pour la BD, notamment la collection 'BD Kids'. Cette forme de romans graphiques est plus facile pour certains marchés que l'album français traditionnel", note Géraldine Hummel, des droits étrangers de Bayard. "On remarque aussi un renouveau du documentaire, qui est très vivant", ajoute Hedwige Pasquet, qui se réjouit de l'accueil de la très graphique collection "Bam". Chez Albin Michel Jeunesse, Aurélie Lapautre a rencontré un vif succès avec Au lit !, la suite de Mon amour, de Pauline Martin et Astrid Desbordes, avec des coéditions dans plus de 20 langues, et Vacances, de Blexbolex, à paraître à l'automne, qui a déjà 8 coéditions.
 
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Les éditeurs chinois sont venus malgré les déclarations du gouvernement chinois qui souhaite moins de titres étrangers pour les enfants. "Tant que le gouvernement chinois ne promulgue pas une loi, le commerce peut continuer comme avant" rassure Nicolas Idier, responsable de l'Institut français en Inde, basé auparavant en Chine. "Les Chinois sont venus quand même et on va trouver une façon de travailler avec eux quoi qu'il arrive", commente Aurélie Lapautre. "On voit des interlocuteurs sérieux avec lesquels on a des partenariats de longue durée, y compris en Chine", ajoute Marie Dessaix, directrice des droits de Nathan Jeunesse.

Parallèlement, les BOP (Meilleur éditeur de l'année) ont distingué l'italien Orecchio acerbo pour l'Europe, le guinéen Ganndal pour l'Afrique, le sud-coréen Borim Press pour l'Asie, le colombien Babel Libros pour l'Amérique du Sud et centrale, le canadien Kids Can Press pour l'Amérique du Nord et l'australien Berbay Publishing pour l'Océanie.

Pourtant, les professionnels ne se mélangent pas à Bologne. Certains ne quittent pas leur table et vendent des droits à tour de bras. D'autres font le siège des agents. Certains se passionnent pour les expositions, y compris celles en ville, et attendent impatiemment la proclamation du prix Alma, tandis que d'autres se retrouvent dans les réunions internationales de leur groupe. D'autres encore passent leur temps dans les conférences. Tous y trouvent leur compte avec, pour seul dominateur commun, la gastronomie bolognaise.

Et si cette diversité était la recette du succès? La 55e édition devrait se tenir du 26 au 29 mars 2018, après consultation de la Foire de Londres, afin de coordonner les agendas. Elena Pasoli, elle, rêve d'un congrès international des libraires indépendants pour la jeunesse.

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