C’est une mission des bibliothèques départementales affirmée par la loi relative aux bibliothèques et au développement de la lecture publique : favoriser la mise en réseau des bibliothèques des collectivités territoriales ou des intercommunalités. Présents aux journées d’étude de l’Association des bibliothécaires départementaux (ABD), les 26 et 27 septembre au château de Chamerolles (Loiret), trois professionnels en détaillent les enjeux.
Pourquoi encouragez-vous la mise en réseau des bibliothèques de votre département ?
Mélanie Steinbach, responsable adjointe du service du développement territorial de la lecture publique à la Bibliothèque d’Alsace : Le réseau est l’échelle pertinente pour desservir au mieux l’intégralité des publics d’un territoire, avec des services qualitatifs : horaires d’ouverture complémentaires et tarifs harmonisés, site Internet avec catalogue en ligne et navette locale, politique documentaire partagée… Cela permet aussi de mutualiser des compétences des salariés et bénévoles, du matériel, de la programmation culturelle, des outils de médiation, de la communication…
Marie-Joe Mallet, Cheffe de service Sud et Ouest à la BDP de Dordogne : Il n’y a que des avantages à la mise en réseau. Cela permet une émulation des équipes pour l'animation, la formation. Les collections peuvent circuler entre les médiathèques et être visible par un plus grand nombre.
François Rosfelter, directeur de la BD de la Vienne : Que des avantages à terme, mais des passages difficiles.
Quelles difficultés ?
François Rosfelter : La première est de définir un projet commun autour duquel se rassemblent élus et bibliothécaires (professionnels et bénévoles). Qu'est qu'on met en réseau et pourquoi ? Qu'est ce qu'on garde éventuellement en "communal" et pourquoi ?
Marie-Joe Mallet : Il faut trouver le réseau adapté au territoire. Pour ne pas créer de hiérarchie, certains réseaux n’ont donc pas de responsable, et l’organisation est horizontale.
François Rosfelter : Une chose qui peut inciter des décideurs politiques frileux dans cette démarche est de leur proposer le dispositif des contrats de territoire lecture (CTL), qui leur permet de faire une première expérimentation sur trois ans, renouvelable une fois.
Mélanie Steinbach : Mais c’est difficile de trouver un coordinateur de réseau qui accepte un CDD de trois ans ! Les collectivités n’ont parfois pas le budget pour prendre en charge cette dépense en totalité au-delà des 3 ans du CTL. Un autre motif de résistance à la création de réseaux de bibliothèques : des bénévoles de petits établissements ont peur d’être « mangés » par la grande bibliothèque. Notre rôle est alors de leur expliquer qu’elles sont complémentaires et souligner leur atout de proximité. L’équipement principal ne doit pas écraser les autres mais les embrasser !
Pour assurer la bonne gestion du réseau, faut-il selon vous créer des formations de coordinateurs de réseaux ?
François Rosfelter : Le métier varie beaucoup d’un territoire à l’autre, car la forme des réseaux est très diversifiée, certains harmonisent seulement leurs tarifs ou leurs horaires d’ouverture, d’autres partagent seulement les animations et les documents… Une formation standard n'est donc sans doute pas la meilleure formule, qui reste à inventer.
Marie-Joe Mallet : L'important est de réfléchir à une fiche de poste et la BDP peut y aider.
En tant que bibliothécaires départementaux, disposez-vous de tous les outils et compétences pour aider à la création de réseaux ?
Mélanie Steinbach: La Bibliothèque d’Alsace propose par exemple des ateliers (gratuits !) qui associent les équipes des bibliothèques et les élus qui souhaitent mener une réflexion sur la mise en réseau. Nous leur présentons différents modèles inspirants, car il n’existe pas un modèle de mise en réseau. C’est important de le souligner : celle-ci doit s’adapter à chaque territoire.