On pourrait dire que Les autres histoires d’amour est un roman. Il y a un narrateur, rédacteur dans un journal local, sa femme, son fils, son "meilleur pote", scénariste de sitcoms, son grand-père qui l’a élevé dans une campagne roumaine. Il y a un château d’eau, un quartier gitan, un "Pont-tordu", une vache, des oies, des échasses et une barque… Mais le deuxième titre traduit en français par Gaïa, après L’histoire de Bruno Matei (2013), du quadragénaire Lucian Dan Teodorovici est aussi un recueil de onze histoires courtes que l’on peut lire de façon autonome, comme des épisodes de la vie du narrateur, à différents âges de sa vie, cartes postales qui arriveraient postées dans le désordre. Toutefois, il serait dommage de ne pas respecter l’ordre narratif composé par l’écrivain car c’est précisément l’enchaînement de récits qui se complètent et se répondent qui crée l’intelligence de l’ensemble. Son côté un peu ivre, valse titubante aussi, comme dans les dialogues, souvent abondamment arrosés au whisky ou (et) à la bière et traversés par la profondeur fulgurante et l’incohérence des cuites sévères qui "font mal aux cheveux" le lendemain. C’est un livre où l’on discute beaucoup, on s’explique, on se justifie, on négocie, "on parle". Le fond des conversations, qu’elles soient amicales ou amoureuses, est noir sans être glorieux - doute, ennui, infidélités ébranlent les histoires d’amour - : un homme se pend par déception amoureuse ; après dix ans de mariage, un couple tente de surmonter une crise ; le narrateur met fin à une liaison ; une fiancée meurt dans un accident de voiture… Mais pour la route, on peut toujours compter sur les Monthy Python et Leonard Cohen, en VO dans le texte : Dance me to the end of love.
Véronique Rossignol