Une voix en or. Paris, 1935. Aux abords de l'Opéra-Comique, c'est l'effervescence des grands soirs. Rigoletto est à l'affiche et les partitions de Verdi, réputées « démoniaques » pour leurs interprètes, attirent les mélomanes les plus exigeants. Déjà, trois élèves de l'école des Arts et Métiers se gaussent : va-t-il « falloir se farcir deux heures de "hurlements de gens qu'on ébouillante" », selon la formule qui circule dans leur école ? Jean-Marie Gheusi est fébrile. Le directeur de la salle Favart n'ignore pas les difficultés financières de son théâtre. « Les voix, voilà le vrai problème. Les belles sont si difficiles à trouver. » Mais soudain, l'inespéré se produit. « Une météorite vient de crever le plafond » : le second rôle vole la vedette au rôle-titre. Quand le rideau tombe, les vivats et les applaudissements célèbrent la naissance d'une nouvelle étoile.
En coulisses, Mademoiselle Renoult, professeure de rôles reconnue dans le monde entier, couve du regard son protégé. À ses côtés, Jean-Marie Gheusi négocie déjà de nouvelles dates pour le ténor. Mais qui est donc cet Elio Leone que la capricieuse presse parisienne porte instantanément aux nues ? « Une fois dans sa vie, il faut avoir entendu chanter cet homme-là », lit-on dans Paris-Soir. Pourtant, Elio Leone ne sort pas du Conservatoire de musique de Paris, n'a pas été page à l'Opéra ni fait ses armes dans aucune troupe. Sa naissance dans une étable de San Giorgio, près de Naples, ne le destinait pas à connaître pareille renommée. D'autant que la voix de ténor n'existe pas naturellement. « Il faut se la fabriquer. Pire, il faut la mériter. » Et c'est à force d'un travail acharné, mais aussi grâce aux rencontres que sa bonne étoile met sur sa route, qu'Elio forge sa légende. Mais toute médaille a son revers, et derrière les décors somptueux des théâtres, l'âme du jeune homme se débat avec ses démons.
Sous la plume d'Alexia Stresi, le faste de ces décors d'antan revit et forme l'arrière-plan de la trajectoire d'un homme parti de rien. Suivant son parcours, le lecteur vibre, tremble, frémit, immergé dans une histoire intime et universelle qui rappelle que, pour bâtir des lendemains qui chantent, il faut souvent faire le deuil d'une part de soi.
Des lendemains qui chantent
Flammarion
Tirage: 10 000 ex.
Prix: 21 € ; 464 p.
ISBN: 9782080413277