Je me sens bien seul, loin des agapes auxquelles ont été conviés les autres animateurs de blogs de Livres Hebdo . Au moins, il fait très beau chez moi et, pendant que François Taillandier pensait aux événements de Madagascar en 1947, Jean-Luc Raharimanana et Thierry Bédard m’envoyaient des messages pour m’informer de ce que devient l’aventure de leur pièce ( 47 ). Du coup, j’ai même reçu une lettre de Bernard Kouchner ! Qui, il est vrai, ne m’étais pas adressée… En ces derniers jours de l’année, je fais comme Nicolas Jalageas : je travaille beaucoup. Mais en lisant, avec très peu de musique. Je termine la réédition électronique, pour la Bibliothèque malgache , d’un épais récit de voyage à… Madagascar (vous vous en doutiez un peu) accompli par Leguével de Lacombe de 1823 à 1830. C’est plus reposant que 1947, François. Et il y a les livres de janvier. A l’heure du déjeuner parisien, je devais être, dans les hauteurs de Tana, occupé à terminer Mal de pierres , de Milena Agus, que Le Livre de poche réédite le 7 janvier. Un roman bref et dense, bouleversant, à la rencontre duquel peuvent aller tous ceux qui, comme moi, ne l’avaient pas encore lu. Il se prolonge par une postface où la romancière se révèle bien modeste : « A mon avis, il y a les vrais écrivains et ceux qui écrivent, et le qualificatif d’écrivain, ça se mérite. Tout comme nous ne dirions jamais de quelqu’un qu’il est cuisinier uniquement parce qu’il nous a préparé deux ou trois bons petits plats, de la même façon, pour être écrivain, deux ou trois livres ne suffisent pas. C’est pour cela que je me sens « quelqu’un qui écrit », que le terme « écrivain » me fait peur et que, pour le moment, je le refuse. » Emboîtant le pas à Claude Poissenot, je me demande comment s’annonce 2009 – sur le terrain, le terreau des livres, bien entendu. Plutôt bien, me semble-t-il. Refermant Mal de pierres , j’ai ouvert Borges en dialogues , les entretiens entre Jorge Luis Lorges et Osvaldo Ferrari parus en Argentine il y a 23 ans, traduit en français il y a 18 ans, et en 10/18 l’année prochaine, c’est-à-dire dans quelques jours (le 8 janvier). L’intelligence de Borges me fascine. Il peut, lui aussi, faire appel à la modestie quand il raconte la naissance d’un texte : « Cela commence par une sorte de révélation. Mais j’utilise ce mot avec modestie, sans ambition. C’est-à-dire que soudain je sais qu’il va arriver quelque chose »… La littérature a, je me rassure ainsi, de beaux jours devant elle. Quant au coup de rouge avec les amis, je l’ai pris sans attendre l’obligation du calendrier. La pose de deux poignées sur une fenêtre ne pouvait pas être un mauvais prétexte – et d’ailleurs il n’en est pas de mauvais, je rejoins Françoise Benhamou. En définitive, je ne me sens pas si seul : les livres, les amis, et même les échos du déjeuner où je n’étais pas…