L'échappée rebelle. Elle honnit cette chose, jusqu'au mot qui la désigne - la répétition. Ethel Aden, personnage éponyme du deuxième roman de Marie de Chassey - longtemps musicienne et aujourd'hui scripte -, joue du piano depuis sa plus tendre enfance. Ça a commencé comme un jeu avec sa mère qui lui faisait reconnaître les notes. « Le jeu s'est rapidement transformé en heures de gammes, en études, en concours, en récitals. Avec sa mère près d'elle toujours. Et ce désir de la satisfaire. » La discipline l'aura menée à une carrière aussi brillante qu'aliénante. Les mains d'Ethel sont assurées comme celles d'un chirurgien, le contrat est identique - remboursé moins cher pour le petit doigt. Le soir, il lui arrive de faire du vélo juste pour se sentir libre. Le jour, elle répète encore et encore, ses dates de concert sont les maillons d'une lourde chaîne. Pierre, son assistant, est son geôlier. Café préparé seulement pour deux tasses de peur qu'elle tremble à cause d'un excès de caféine, taxi prépayé qui l'empêche de changer d'itinéraire... Toute cette prévenance de Pierre l'agace. Il parle trop. Les gens parlent trop. Au dîner après le concert, elle n'a pas envie d'expliquer comment elle interprète tel concerto... Claude, le chef d'orchestre avec qui elle partage sa vie, raconte qu'il appartient à une famille de musiciens, elle ironise sur le fait de ne pas désirer d'enfant : « M'occuper de moi, c'est déjà beaucoup. » S'est-elle jamais souciée de ce qu'elle voulait vraiment ? C'est ce à quoi va devoir répondre l'héroïne, « seule parmi les autres », de ce roman d'émancipation tout en délicats contrepoints.