Portrait

Yenad Mlaraha (Fayard) : « Je défends le droit de Jordan Bardella d’être publié »

Yenad Mlaraha, 31 ans, est le Directeur de la communication de Fayard depuis septembre 2024 - Photo DR

Yenad Mlaraha (Fayard) : « Je défends le droit de Jordan Bardella d’être publié »

Après une expérience en politique, du côté de La République en marche (LREM), puis dans les médias chez C8, le directeur de la communication de Fayard découvre le monde de l’édition avec comme galop d’essai la sortie du premier livre du président du Rassemblement national Jordan Bardella.

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Par Éric Dupuy
Créé le 29.10.2024 à 20h01

À 31 ans, Yenad Mlaraha est depuis début septembre à la tête de la communication de la maison Fayard.

L’entité historique du groupe Hachette publie le 9 novembre Ce que je cherche, le premier livre de Jordan Bardella, patron du Rassemblement national. L’aurait-il imaginé lui-même il y a encore quelques mois ?

Créateur de punchlines

La réponse fuse comme si elle avait été savamment préparée : « Publier Jordan Bardella ne signifie pas adhérer à ses idées : je défends son droit de s'exprimer », s’exclame celui qui se revendique créateur de punchlines. Et d’ajouter que « de nombreux Français ont voté pour lui aux dernières élections et sont en droit de savoir ce qu’il pense concrètement ».

Yenad Mlaraha
Né à Orléans d'une mère martiniquaise et d'un père d'origine comorienne, Yenad Mlaraha est passé par Angers et Toulouse avant de s'installer à Paris - Photo DR

Avant d’en arriver là, cet enfant d’Orléans fils d'une paysagiste martiniquaise reconvertie dans l’assistance maternelle et d'un policier président d’association d’aide communautaire comorien, bercé par les cultures de deux océans, s’est intéressé à la publicité. Après être passé par Angers puis Toulouse en licence, il monte à Paris pour suivre un Master de communication publique et politique à l’European Communication School (ECS). Lui qui se dit « profondément de gauche », s’engage alors dans la campagne des élections présidentielles de 2017.

« J’étais entouré de gens qui étaient déçus, voire dégoûtés de la politique et qui y revenaient parce qu’ils ont senti à ce moment-là que les choses pouvaient changer », raconte celui qui a fait du porte-à-porte pour le candidat d’En Marche, Emmanuel Macron. « Malheureusement voilà, poursuit-il tout de go. Quand on place trop d’espoir envers quelqu’un ou une cause on est très souvent déçu… »

« Pourquoi les noirs sont » sur Google

Avant même la fin de sa deuxième année de Master, il est engagé à l’Assemblée nationale comme assistant parlementaire de Monique Limon, députée LREM d’Isère venue du PS et qui ne s’est pas représentée en 2022. C’est bien avant cela, en 2019, qu’il est repéré par Marlène Schiappa, alors secrétaire d’Etat chargée de la lutte contre les discriminations, après un tweet sur les propositions de recherche google (voir ci-dessous).

Que retient-il de cette expérience de cinq ans en politique ? « Cela m’a apporté une grande richesse, m’obligeant à me spécialiser sur des sujets très rapidement », résume-t-il en concédant toutefois une certaine difficulté à trouver un bon équilibre de vie.

Essoré, il quitte le milieu politique en même temps que sa patronne à l’été 2023 et rebondit dans les émissions de Cyril Hanouna sur C8, propriété du groupe Vivendi – comme Lagardère, maison mère d’Hachette, pour une demi-douzaine d’apparitions à l’écran, tout en créant sa société de conseil de stratégie en communication.

« Innover sur les méthodes traditionnelles de promotion »

Peu après, Lise Boëll est nommée à la tête des éditions Fayard, en juin dernier. La P-DG doit revoir entièrement son équipe de communication. Elle engage d’abord l’ancienne attachée de presse des éditions XO, Anissa Naama, comme directrice du service de presse, puis fait appel à Yenad Mlaraha.

« J’ai surtout été séduit par le challenge d’intégrer ce secteur de plus en plus concurrentiel et d’innover sur les méthodes traditionnelles de promotion », affirme-t-il après avoir dégainé une nouvelle punchline qui semble préparée de longue date : « Fayard est une maison historique résolument tournée vers l’avenir ».

Yenad Mlaraha
Peu après son arrivée chez Fayard, Yenad Mlaraha a lancé Fayard Livres Solidaires pour distribuer des livres destinés au pilon aux étudiants, en partenariat avec l'association Linkee.- Photo DR

À la tête du service communication, qui comprend donc deux autres personnes (avec Florian Madisclaire directeur du digital, chez Fayard depuis 2019), Yenad Mlaraha a pour objectif « d’amplifier les voix des auteurs et de positionner la maison comme une référence incontournable dans sa capacité à créer du lien entre les talents littéraires et les lecteurs ».

Concrètement, il s'agit de sortir des sentiers battus et d'aller chercher les potentiels lecteurs dans leur quotidien. « Lors de mon expérience en politique, on a réfléchi à comment communiquer massivement autour du numéro d’aide aux violences conjugales et nous avons choisi de le faire imprimer sur les tickets de caisse, explique-t-il. Et cela a fonctionné ».

Porte-parole de Fayard

Campagne humanitaire (lire ci-après), promotion dans la presse locale, Yenad Mlaraha cherche à surprendre et pas forcément sur les réseaux sociaux. « Nous allons mettre en place ponctuellement des dispositifs de communication inédits », affirme-t-il tout en reconnaissant que, parfois, la communication sera pilotée en externe.

C’est d’ailleurs le cas pour la stratégie autour de Ce que je cherche de Jordan Bardella, directement administrée par son attaché de presse, comme c’est généralement l’usage pour la sortie des livres de personnalités politiques. Concernant la publicité et les campagnes d'affichage pour la promotion, dont celle retoquée par la filiale de la SNCF Mediatransport (lire ci-contre), c'est la direction de la communication du groupe qui pilote.  

Reste à sa charge d’être le porte-parole de Fayard autour de cette sortie et de minimiser l’impact négatif que celle-ci peut avoir pour l’image de marque de la maison. « Fayard a toujours été une maison où les idées s’affrontent, s’échangent et où les opinions diverses cohabitent », assure-t-il, en rappelant qu’il a défendu la sortie en septembre des livres de la députée LFI Danielle Simonnet ou du journaliste Thomas Hofnung sur la Françafrique.

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