Chic, revoilà Louise. L’héroïne et double littéraire de Justine Lévy, on l’a déjà croisée dans Rien de grave (Stock, 2004, repris au Livre de poche) et dans Mauvaise fille (Stock, 2009, repris au Livre de poche), adapté en 2012 au cinéma par Patrick Mille.
La demoiselle qu’on retrouve dans La gaieté hait la poussière et les dimanches, déteste l’ironie et les surprises "bonnes comme mauvaises". Sa fragilité et son manque d’assurance sont toujours là, solidement ancrés. Pas le genre à s’épargner, Louise se présente comme une fille flemmarde, peureuse et pleureuse. Une fille qui adore son père souvent occupé à sauver le monde. Un père qui vient si elle appelle à l’aide.
Louise vit depuis dix ans avec Pablo. L’"urgence incarnée". Un type toujours en mouvement, "même dans son bain même en dormant". Une sorte de "guerrier" auprès de qui elle a besoin de se blottir. Le couple a eu deux enfants, Angèle et Paul. Tout pourrait aller pour le mieux si Louise n’était pas une maman "control freak". Si elle n’était pas régulièrement rattrapée par la peur et la tristesse. Alors qu’elle ne sait que trop bien que la gaieté est capable de tout sauver, de tout faire oublier. Mais on n’oublie pas facilement son passé et ses démons. Et encore moins une mère pas banale qui a brûlé sa vie et s’en est allée trop vite.
La mère avait les yeux "les plus bavards du monde". Elle pouvait entraîner sa fille dans des endroits pas possibles et s’adonnait plus que de raison à la poudre blanche. Son absence laisse à Louise un point de côté permanent. Avec gouaille et humour, sincérité et allant, celle-ci prend le taureau par les cornes et vide une nouvelle fois son sac. On aime à l’écouter raconter ses énervements, ses bizarreries. On se plaît à la suivre à une fête d’anniversaire, où elle se tient fort mal, comme à un concert énergique de Motörhead, où elle double les boules Quies pour mieux profiter du spectacle.
Tantôt on rit, tantôt on a la gorge serrée. Un roman vrai mené tambour battant par une Justine Lévy qui possède décidément un ton bien à elle. L’auteure du Rendez-vous (Plon, 1995, repris chez Pocket) arrive en un tour de plume à rendre attachante au possible une Louise à la fois blessée et forte. Une Louise qui affirme qu’elle veut qu’il ne lui arrive rien, "absolument et délicieusement rien". Qu’elle veut "du coton, de la ouate et des rires". Une Louise qui peu à peu va vers le bleu. Comme dans la chanson de Dominique A.
Alexandre Fillon