Si l’on souhaite attaquer l’année 2014 dans la bonne humeur, il n’y a sans doute pas meilleure destination qu’une petite île grecque. C’est là que le dramaturge et romancier anglais Michael Frayn a situé l’action de son nouveau livre. Le désopilant Bienvenue à Skios dont on ne peut tourner les pages sans risquer un éclat de rire.
Discrètement blonde et légèrement hâlée, Nikki Hook est une jeune femme à qui une vielle dame a lancé qu’elle avait toujours l’air de sortir « d’un spot pour un déodorant ». La Britannique est la secrétaire particulière de l’Américaine Mme Fred Toppler, la patronne d’une fondation philanthropique à qui elle suggère des idées qu’elle est censée avoir elle-même. Nikki organise et vérifie tout. Notamment la venue à Skios du Dr Norman Wilfred. Un maître dans sa spécialité, un expert reconnu du management qui voyage en classe affaires avec sa valise noire lestée d’une étiquette rouge et qui doit donner une conférence très attendue. Rien ne va tourner tout à fait rond à cause de l’apparition du dénommé Oliver Fox. Le genre de type qui ne peut pas s’en empêcher ! Qui fonce bille en tête avec ses cheveux blonds ébouriffés, son regard doux et souriant. Regard pour lequel la belle Georgie est prête à tant de petits arrangements et de mensonges. Au casting, mentionnons aussi la présence de Spiros, un chauffeur de taxi qui propose à ses clients de fournir des « amphores antiques véritables » et de s’occuper des « mauvaises odeurs fosses septiques »…
Michael Frayn a un talent manifeste pour les chassés croisés, les situations improbables. Diaboliquement habile, l’auteur de Tête baissée (Gallimard 2000, repris en Folio) et d’Espions (Gallimard 2004, repris en Folio) signe une comédie brillante, intelligente, d’une permanente drôlerie, bien plus profonde qu’on le croit d’abord. Bienvenue à Skios est un roman qui procure un bien fou. On imagine déjà l’adaptation cinématographique que pourraient en tirer les frères Coen qui seraient avisés de se pencher illico sur la question !
Al. F.