Dans une vie antérieure, Julie Bonnie fut la chanteuse du groupe Cornu. Robin Feix, lui, est le bassiste de Louise Attaque - et aussi le graphiste. Ils se sont croisés jadis. Julie a demandé à Robin d’illustrer son conte surréaliste dans l’esprit de Lewis Carroll, à quoi ses dessins rajoutent encore de l’étrangeté. Le résultat est ce petit livre inclassable, dont l’on n’est pas sûr, lecture faite, d’avoir tout compris.
Alice, donc, la narratrice, est mariée avec Alfred, qui a installé dans leur maison une roue de moulin qu’elle aime beaucoup. Ils ont deux enfants, Charles et Alma. Ils semblent heureux. Mais Alice a besoin de faire une pause d’une semaine, afin de chercher des mots à mettre sur un secret douloureux, intime, enfoui au plus profond : son premier amant, lorsqu’elle avait 12 ou 13 ans, un "plus grand", l’aurait violée. Durant cet exercice d’anamnèse, vont se succéder des actes inconsidérés (elle met le feu à son jardin), des insomnies, des hallucinations (elle croit voir, pendu, son "prédateur"), des déambulations, quelques rencontres. Au début, elle ne parvient pas à écrire, puis, de retour chez elle, les mots viennent enfin. A la fin, fidèle à sa promesse, elle brûle son tapuscrit, dont ne demeurent que cinq lettres, OTHNE, qu’elle avale !
On est à fois loin de Chambre 2 et de Mon amour, les romans à succès de Julie Bonnie, mais au cœur de ses mêmes angoisses. Jean-Claude Perrier