Megan Abbott est manifestement l'une des plus intéressantes écrivaines apparues depuis longtemps dans le domaine du polar et du roman noir. Repérée chez Sonatine en 2009 avec Absente (repris au Livre de poche), l'Américaine née à Detroit a ensuite rejoint le catalogue des éditions du Masque avec Adieu Gloria (2011) qui avait été couronné par le prestigieux Edgar Award.
Toujours au Masque, et désormais traduite par Jean Esch, Mrs Abbott signe aujourd'hui son meilleur livre. Red Room Lounge se déroule une nouvelle fois dans les années 1950. Enseignante dans une école, la narratrice se nomme Lora King. Celle-ci est, depuis l'enfance et la mort de leurs parents, particulièrement proche de son frère William avec lequel elle habite. Inspecteur adjoint auprès du procureur de Californie, "Bill" a rencontré sa femme, Alice, grâce à un accident de la circulation.
La frêle Alice à la peau d'albâtre ne peut certes pas laisser indifférent. Couturière pour les studios hollywoodiens, elle semble toujours en mouvement, comme prise d'une "étrange et inquiétante agitation". D'emblée, Alice a cherché à devenir une épouse modèle, la reine des dîners et des réceptions. Les premiers temps, Lora a elle aussi succombé à son magnétisme et sa vitalité, appréciant de l'accompagner danser et boire plus que de raison. Elle a pourtant rapidement eu envie d'en savoir plus sur sa belle-soeur. De comprendre "ce qui avait réussi à s'introduire dans [leur ] famille, dans [leur ] vie".
Car de toute évidence, Alice n'a vraiment rien d'une blanche colombe tombée du nid et pourrait bien par le passé avoir fréquenté des gens peu recommandables... Megan Abbott joue habilement sur la psychologie, le suspense, à mesure qu'elle laisse le doute s'installer. Les fans de Mad Men vont adorer ce roman glamour, ténu et vénéneux qui ne cesse de monter en puissance.